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Williams FW11B

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Après une saison 1986 marquée par la perte du titre des pilotes Williams dans les tous derniers moments de course, 1987 se devait d’être l’année de la consécration pour l’écurie anglaise avant sa séparation avec le motoriste Honda.

La lutte à trois pour le titre pilote 1986 reste l’une des plus célèbres de l’histoire de la Formule 1. Déjà assurée de la couronne constructeur, la première pour Honda, l’écurie Williams était en passe d’assurer le doublé, ses deux pilotes, Piquet et Mansell, ayant de très grandes chances de tout rafler. Mais une crevaison plus tard et un changement de pneumatiques par précaution plus tard, voici que Prost chipe le commandement avant de s’imposer et de rafler le titre pour deux petits points devant Mansell, trois devant Piquet. Cette défaite fut assez dure à encaisser par le team anglais, convaincue d’être la plus grande force du plateau. Pour 1987, la monoplace n’évolue donc que peu. Il s’agit d’une grosse évolution de la FW11, baptisée FW11B. Si le moteur reste un V6 Turbo Honda, ce dernier subit une grosse mise à jour, tout en obéissant aux nouvelles réglementations sur le bridage des turbos. De ce fait, plus de 900 cv sont tirés du V6 d’1,5L, culminant à près de 12 000 trs/min. Outre l’amélioration moteur, le système de refroidissement est entièrement revu avec de plus gros radiateurs installés latéralement sur le châssis. L’aérodynamique n’est cependant pas trop impacté, de petits changements étant à noter mais sans grande révolution. Toutefois, la hauteur générale de la caisse est abaissée, de même que la position du pilote, de façon à améliorer le flux d’air vers l’aileron arrière. La révolution se trouve plutôt au niveau des suspensions avec les débuts de développement de la fameuse suspension active et son gain de performance supplémentaire.

A l’aube de la saison 1987, la lutte semble une nouvelle fois s’annoncer entre McLaren et Williams. Mais l’écurie de Frank Williams sait que rien ne sera acquis facilement, l’année passée étant le meilleur moyen de le rappeler. Si la FW11B domine comme en 1986, alors des consignes d’équipe pourraient entrer en jeu pour avantager l’un des deux pilotes pour la couronne mondiale. Problème, Mansell et Piquet se détestent ouvertement, de quoi provoquer quelques étincelles. La saison débute au Brésil et à peine les qualifications terminées, la hache de guerre est déjà déterrée. La cause ? Mansell roula presque une demie seconde plus vite que le Carioca, évoluant à domicile. Mais les points ne sont marqués qu’en course et l’ordre peut très bien s’inverser. C’est ce qui se passa, Piquet deuxième, Mansell sixième, la faute à une piste surchauffée, tout comme le V6 Honda, privé d’air frais par les détritus envoyé sur le circuit par les spectateurs. Facile vainqueur, Prost, sur McLaren, jubile devant la défaite du clan Williams. Mais la saison est longue et les machines bleues, blanches et jaunes n’ont pas dit leur dernier mot. Et c’est à St-Marin que l’écurie britannique veut faire chuter McLaren mais leurs espoirs sont vites douchés. Durant les essais du vendredi, Piquet aborde la courbe de Tamburello à plein gaz quand l’un de ses pneumatique se délamine. Projeté à pleine vitesse dans le mur, le brésilien est sonné. Sa monture, elle, est totalement disloquée. Sous les conseils des médecins, il ne prendra pas le départ malgré sa forte envie de piloter. En qualifications, le moustachu n’accroche que le second temps, un dixième derrière Senna et sa Lotus-Honda avec suspension active. Par chance, l’anglais inversa la tendance le lendemain, menant une course d’attaque, s’imposant avec près de trente secondes d’avance sur son rival du jour Senna. En Belgique, la FW11B fait des merveilles sur un tour, l’anglais devançant son équipier en première ligne de plus d’une seconde et demie ! Mais le lendemain, l'histoire est toute autre. Après un second départ suite au crash des Tyrrell, Mansell s’accroche avec Senna et perd de très nombreuses positions. Au dixième tour, alors que Piquet menait facilement, un problème électronique détruisant son V6 nippon. Quelques boucles plus tard, c’est l’autre FW11B qui s’arrête, trop abîmée dans la sortie du premier tour pour continuer. Après trois courses, la monoplace désignée comme celle à battre n’aura inscrit qu’un succès et deux podiums, déjà loin du compte de McLaren et Prost. Le grand-prix de Monaco ne fait que suivre ce début de saison compliqué. Qualifiées première et troisième, les Williams ne pourront empêcher le triomphe de Senna, le brésilien devançant son compatriote Piquet tandis que l’autre FW11B dû renoncer sur problème moteur en début d’épreuve. A ce moment-là, les pilotes Williams ne pointent qu’en quatrième et cinquième place du championnat, un coup dur pour l’écurie britannique.

La manche suivante se déroule sur le circuit urbain de Détroit. Si les Williams sont favorites, le début de saison quelque peu calamiteux a ouvert une voie royale à McLaren et Lotus pour prendre le commandement. Très rapide sur un tour, Mansell s’élance de la pole position et mène un rythme plutôt élevé jusqu’à son arrêt aux stands. Malgré un petit cafouillage, il reprend la piste en troisième place et se lance alors dans un sprint effréné. Malheureusement pour lui, son corps ne supporta pas un tel effort. Remonté second, l’anglais doit lever le pied à quelques tours du but, une importante douleur dans la jambe droite l’obligeant à ralentir. Il terminera tant bien que mal en cinquième place, loin du résultat escompté. De même pour Piquet, accrochant la deuxième place de Prost dans un dépassement osé mais finissant loin de son compatriote Senna, désormais leader du championnat. Les mines sont fermées dans le clan Williams qui espère à présent que le retour en Europe ne soit que bénéfique. Cette fois-ci, leurs voix furent entendues. En arrivant sur le circuit Paul-Ricard, un visage refait son apparition dans le garage de l’écurie britannique, celui de Frank Williams, terriblement accidenté un an auparavant, désormais en fauteuil roulant. Une nouvelle fois, Mansell démarre en pole position sous une chaleur étouffante. Leader durant une bonne partie de la course, il se fait pourtant dépasser au jeu des arrêts, Piquet et Prost le devançant. Grâce aux soucis du français, les deux Williams se retrouvent en tête et rapidement, la bataille s’engage entre les deux. Peu après la mi-course, le brésilien part au large et offre sa première place à son équipier. S’il commence par le pourchasser, le Carioca décida de passer à une stratégie plus agressive avec un deuxième arrêt aux stands. Malheureusement, il cala en repartant, anéantissant ses chances de succès. Il parviendra à se défaire facilement de Prost mais échouera à sept secondes de Mansell. Mais quoi qu’il en soit, Williams signe ici son premier doublé de l’année et s’empare, par la même occasion, de la première place au tableau des constructeurs. La manche suivante est celle à domicile pour Frank Williams et ses hommes, sur le rapide tracé de Silverstone. Collant plus d’une seconde à la concurrence, les FW11B sont à nouveau les plus rapides sur un tour. Elles le seront sur toute la durée du grand-prix. Si au départ Prost saute les deux Williams, il ne peut les contenir et doit abandonner le commandement au bout de deux tours. Rapidement, les deux machines bleues, blanches et jaunes creusent l’écart, Piquet devant Mansell. Mais à mi-course, l’anglais choisit de s’arrêter pour chausser des gommes plus fraîches. Repartant à presque trente secondes de son coéquipier, Nigel attaqua comme un beau diable jusqu’à revenir dans le sillage de l’autre FW11B. A moins de trois tours du but, les deux compères sont roues dans roues. Dans “Hangar Straight”, Mansell tente de se décaler à gauche pour dépasser son équipier. Voyant la manoeuvre de l’anglais, le brésilien le bloqua en se rabattant devant lui mais tout cela n’était qu’une feinte : Nigel plongea à l’intérieur dans l’ouverture laissée par le Carioca et chipa la première place pour ne plus la quitter. Le public exulte, leur pilote a gagné au prix d’une manoeuvre incroyable. Ce deuxième doublé offre un confortable matelas d’avance au championnat constructeur et dès lors, personne ne voit qui peut battre à la régulière les FW11B.

En arrivant en Allemagne, le marché des transferts se met en marche. Plusieurs rumeurs éclatent au grand jour, notamment l’arrivée du V6 Honda chez McLaren, de quoi fortement inquiéter Williams pour la saison suivante. Sur le très rapide circuit d'Hockenheim, les quatre hommes forts du championnat se partage les quatre premières places sur la grille. En course, c’est Prost qui mène la danse, devançant les deux Williams de Mansell et Piquet. C’est alors qu’un problème moteur pousse l’anglais à l’abandon, incident plutôt rare pour le motoriste nippon. Alors que la McLaren semblait s’imposer sans difficultés, un pépin mécanique met fin à tous les espoirs des rouges et blancs à quatre tours du but. Sage deuxième, Piquet hérite de la tête et s’impose pour la première fois de la saison devant un Johansson second, sur trois roues ! En plus de son premier succès de l’année, le brésilien prend le commandement du championnat. Mais quinze jours plus tard, coup de théâtre. Le Carioca annonce sa séparation officielle avec Williams pour rejoindre Lotus à compter de 1988. De ce fait, Honda, très lié à Piquet, notamment grâce au développement mené par le brésilien, quitte lui aussi le navire à l’issue de la saison. Sans moteur pour 1988, l’écurie britannique prend un coup de massue inattendu, d’autant que la fin de saison approche à grand pas. Pour autant, pas question de sacrifier 1987 qui semble finalement être l’année Williams. En Hongrie, la donne est différente. Le tracé est sinueux et lent, ce qui n’empêche pas Mansell de décrocher une nouvelle pole position. Comme depuis quelques épreuves, les FW11B ne mettent pas longtemps à se retrouver en tête et sans changer de pneumatiques, personne ne peut les rattraper. Mais en fin de course, les gommes très abimées commencent à provoquer de nombreuses vibrations. Moins économe de sa monture, Mansell voit un des ses écrous de roue se détacher de sa monoplace à six tours du but. Cette désillusion fit le bonheur de son équipier, profitant une nouvelle fois du malheur des autres pour s’imposer et accroître son avance au championnat. En Autriche, l’altitude bride quelque peu les moteurs mais cela n’empêche pas les Williams de briller. Après deux gros cartons en deux départs, la course prend enfin forme, malgré un embrayage récalcitrant sur la FW11B de Mansell. Pourtant, ce dernier ne baissa pas les bras et pris autant de risques que possible pour raccrocher son équipier. Il finira par trouver l’ouverture pour ne plus jamais quitter le leadership. Cette fois, aucun problème n’est à signaler et les Williams s’offrent ici leur troisième doublé de la saison.

En arrivant en Italie, Williams étrenne un nouveau système révolutionnaire : la suspension active. Grâce à un ordinateur mesurant les variations de la piste, les suspensions se règlent automatiquement de manière à générer le plus d’appui possible à la monoplace. Déjà utilisé par Lotus, le système Williams s’avère être plus simple d’utilisation et promet des performances inégalées. Pour exemple, Piquet, seul utilisateur de cette technologie, a bouclé une simulation de course sur le circuit d’Imola avec le même nombre de tours qu’en réalité. Résultat, le brésilien tourna trois minutes de moins que Mansell, vainqueur ici même plus tôt dans l’année. La FW11B avec suspension active devient l’animation du week-end et les performances sont loins d’être négligeables. A plein gaz, la monoplace de Mansell rend 15 km/h à celle du Carioca. Reste à connaître la réelle différence en course. Une nouvelle fois, il n’y a pas photo. Peu à l’aise avec sa monture, l’anglais termina troisième de la course, à quarante-neuf secondes de l’autre FW11B gagnante. Si le brésilien jubile, il ne s’impose que grâce à la sortie de piste, dans les derniers tours, de son compatriote Senna et sa Lotus. En coulisses, les tensions montent. Mansell accuse le clan Honda de ne pas lui fournir un moteur équivalant à celui de Piquet et que son avantage est indéniable. Déjà occupé à régler les nombreux différends opposant ses deux pilotes, Frank Williams doit également gérer les problèmes avec le motoriste nippon qui n’aura pas respecter son contrat jusqu’au bout. A Estoril, les Ferrari exécutent un retour en force, éclipsant même les Williams pour la course à la pole. Malgré la suspension active, la FW11B est devancée par la Scuderia et les McLaren en rythme de course. De plus, un souci électrique contraint Mansell à mettre pied à terre, un nouvelle fois. S’il termine troisième, Piquet avoua ne jamais avoir trouvé la bonne cadence mais une chose est sûre, les points de sa troisième place lui assure encore un peu plus une nouvelle couronne mondiale. S’il veut battre le brésilien, Mansell sait qu’il n’a plus droit à l’erreur. C’est ce qu’il fait à Jerez, menant la course de bout en bout, là où Piquet perd son flegme légendaire en commettant de nombreuses erreurs. Il se classa finalement quatrième. Ces précieux points permettent à Williams de remporter le titre constructeur à trois rendez-vous du terme de la saison, une grande fierté pour Frank Williams et ses hommes, bien que très inquiets de leur futur avec Judd en 1988. A noter que pour la seconde fois cette saison, Mansell n’utilise pas la suspension active, au contraire de Piquet. Une fois les manches européennes terminées, c’est au Mexique que se rend la Formule 1. Sans suspensions actives, les Williams sont tout de même rapides, surtout l’anglais, victime d’un gros crash le vendredi mais en pole le dimanche. En course, les deux FW11B manquent totalement leur envol. Pire, le brésilien s’accroche avec Prost et se retrouve bon dernier. Devant, Mansell profite des pépins de ses adversaires pour retrouver le commandement quand à mi-course, l’épreuve est interrompue. Victime d’un énorme crash, Warwick obstrua la piste avec les pneus des barrières de protections. Un nouveau départ est donné, le classement s’établissant sur l’addition des deux manches. A ce petit jeu, c’est bien le pilote anglais de Williams qui sort vainqueur devant son équipier brésilien, bien remonté après ses embûches du départ. A deux manches du terme, rien n’est joué au classement pilote même si le Carioca dispose d’une avance plutôt confortable.

A Suzuka, terre du V6 Honda, la bataille Piquet-Mansell est au coeur de toutes les discussions et sur la piste, c’est dès le vendredi que la lutte fait rage. Signant le premier meilleur temps, l’anglais regagne son garage, fier du chrono réalisé. Quelques instants plus tard, le brésilien descend la marque de son équipier de presque une seconde. Irrité par la prestation, le moustachu reprit la piste mais dans les “esses”, la FW11B quitte la piste. A pleine vitesse, la Williams s’écrase dans les piles de pneus par l’arrière, décolle, avant de retomber sur ses roues. Conscient, Mansell hurle de douleur. Victime de commotions et de contusions, l’anglais n’est pas autorisé à reprendre la piste. De ce fait, Piquet devient champion du monde pour la troisième fois de sa carrière. Pour ne rien arranger, le Carioca n’hésite pas à lancer quelques piques à l’encontre de son équipier : “Ma victoire est celle de l'intelligence sur la bêtise” dira-t-il. Avec une seule voiture au départ, Williams sait que Honda n’attend qu’une victoire à domicile, rien d’autre. Pas de chance cette fois-ci, le V6 nippon déposant toute son huile sur le tracé japonais. La dernière manche à Adélaïde est sans enjeux. Toujours blessé, Mansell est remplacé par son futur équipier chez Williams, l’italien Patrese. Hélas, la course fut très compliquée. En proie à de gros soucis de freins, le récent champion du monde met un terme, plus tôt que prévu, à sa collaboration avec Williams. Celle de l’italien ne commence, quand à elle, pas de la meilleure des manières, une fuite d’huile l’envoyant dans le décor à cinq petits tours du terme. Ainsi, la FW11B disparaît des radars...

Au final, la Williams FW11B aura amassé neuf victoires, douze poles position, dix-huit podiums et sept meilleurs tours. Bien qu’étant la grande favorite, l’écurie anglaise aura vécue une année 1987 très éprouvante. Entre les tensions Mansell-Piquet, la séparation avec Honda, les problèmes techniques au mauvais moment ou les risques inutiles de l’anglais, la saison fut loin d’être de tout repos. A l’issue de la saison, Williams mit au point la FW11C, utilisée uniquement à des fins de tests pour vérifier l’incorporation du V8 Judd dans le châssis anglais.

La Williams FW11B en chiffres...

Grands-prix :

16

Victoires :

9

Podiums :

18

Poles Position :

12

Meilleurs Tours :

7

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