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Ferrari F1-2000

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Vaincre le signe indien et mettre fin à 21 ans de disette, tel était l’objectif de la Ferrari F1-2000.

Après avoir été battu sur le fil en 1998 et après une année 99 faite de hauts et de bas, la Scuderia espère enfin tirer les marrons du feu, notamment avec son pilote fétiche, Michael Schumacher. L’allemand, qui s’est gravement blessé à Silverstone l’année passée, avait toutes les cartes en main pour ravir le titre des pilotes, finalement dévolu à son plus grand rival, Mika Häkkinen. Pour autant, Ferrari s’est consolée avec le sacre au tableau des constructeurs, une première depuis 1983 mais il subsiste un goût d’inachevé pour les hommes de Maranello. L’aube du nouveau millénaire se doit de changer le destin et pour y parvenir, l’écurie italienne présente la F1-2000. La voiture rouge est équipée d’un V10 à 90° d’une puissance avoisinant les 800cv pour un régime moteur culminant à 17 300 trs/min. Si le bruit est impressionnant, la prouesse des ingénieurs l’est tout autant. En choisissant cette inclinaison, les hommes de la Scuderia réduisent la hauteur du bloc et donc le centre de gravité. Sur la balance, la belle italienne pèse tout juste 600 kg comme le requiert le règlement. Très inspirée de l’ancienne F399, la F1-2000 se démarque par quelques petits détails, à commencer par ses pontons plus ronds que ceux de sa devancière. L’aérodynamique en général n’évolue pas drastiquement mais de petites touches sont ajoutées ça et là, comme un museau plus haut. L’élément qui marque peut-être le plus ce passage à une nouvelle ère, c’est la disparition des ailerons noirs, présents sans discontinuité sur les Ferrari depuis 1983, désormais peints en blanc. Outre l’évolution (légère) de la livrée, le plus gros des changements réside dans le choix des pilotes. Exit Eddie Irvine, parti chez Jaguar, voici Rubens Barrichello qui débarque. Le brésilien, déjà en Formule 1 depuis sept saisons, saisit une opportunité de démontrer tout son potentiel avec une équipe de premier rang, même s’il sait, avant même l’entame de saison, que sa place au sein du prestigieux team italien ne lui vaut qu’un rôle de second pilote. Michael Schumacher est encore de la partie et compte bien renverser la tendance face à des McLaren-Mercedes toujours redoutables. Les premiers essais restent cependant confus et les deux grandes écuries ne s’affrontent même pas lors des essais préliminaires. Il se murmure que la F1-2000 serait très rapide mais pas encore assez fiable. Premier round à Melbourne.

Pour la première fois de l’année, le combat entre les deux géants de l’époque est lancé. Ferrari face à McLaren, M.Schumacher et Barrichello contre Häkkinen et Coulthard. Dès les premiers tours de roues, nul doute sur le fait que ces deux équipes monopoliseront le haut de la grille de départ. L’outsider Jordan, en 1999, semble un peu moins dans coup, contrairement aux Williams-BMW, étonnantes avec le nouveau bloc bavarois. Après avoir bien abîmé sa voiture lors des essais, Schumi passe sur le mulet pour les qualifications. Sur l’exercice du tour chronométré, les flèches d’argent sont plus rapides que les rouges mais une interruption de séance, provoquée par David Coulthard dans les tous derniers instants, condamne les pilotes Ferrari, alors en amélioration. C’est donc une deuxième ligne 100% italienne qui se dessine sur la grille de départ. A l’extinction des feux, les F1-2000 peinent à s’extraire de leurs emplacements et Barrichello rétrograde même d’un rang au profit de Frentzen. Après une brève intervention de la voiture de sécurité en raison du très grand nombre de débris laissés ça et là par De la Rosa et Irvine, la course reprend mais devant, c’est la catastrophe. Le V10 Mercedes de Coulthard émet de drôle de bruit et de la fumée s’échappe dangereusement de son capot moteur. Quelques tours plus tard, c’est Häkkinen qui voit son bloc allemand exploser. Les problèmes mécaniques, qui avaient plus ou moins épargné les McLaren durant l’hiver, arrivent soudainement. Avec l’abandon de Frentzen et de sa Jordan, les deux Ferrari font cavalier seul. Si le petit brésilien prend brièvement la tête, c’est uniquement dû à sa stratégie décalée à deux arrêts. La Scuderia n’a désormais plus qu’à gérer jusqu’à l’arrivée, sans forcer. M.Schumacher remporte pour la première fois la manche d’ouverture de Melbourne, devançant Rubinho de onze secondes et R.Schumacher de vingt. La saison démarre très fort pour les rouges mais le double-abandon des McLaren ne doit pas faire oublier qu’en termes de performances, les anglais sont sans doute un poil devant. A Interlagos, fief du petit brésilien, le scénario est identique. Les anglaises bloquent la première ligne alors que les deux Ferrari se tiennent en embuscade, là où les Sauber-Petronas sont contraintes de s’arrêter, ailerons arrière trop fragiles pour tenir la distance. La course se jouera sur la stratégie car les deux écuries ne tablent pas sur le même nombre d’arrêts. Le suspense est donc entier. Dès le premier tour, M.Schumacher se défait de Coulthard puis quelques instants plus tard, et grâce à une voiture plus légère en carburant, arrache la première place à son grand rival finlandais avant de creuser l’écart. Derrière, Barrichello, roi de toute une nation, talonne le double champion du monde sortant mais son sort sera une nouvelle fois bien cruel chez les siens. Peu après le premier tiers du grand-prix, l’hydraulique de sa F1-2000 le trahi. La désillusion est totale pour les milliers de brésiliens ayant fait le déplacement à Sao Paulo. La chance, McLaren ne la connaîtra pas non plus. Häkkinen doit une fois encore renoncer à cause d’un problème mécanique alors que du côté de Coulthard, jamais vraiment dans le rythme tout au long du week-end, c’est une disqualification qui l’attend. La raison : un aileron avant trop bas de 2mm. Sa deuxième place, acquise juste derrière M.Schumacher, revient donc à Fisichella et sa Benetton alors que Frentzen grimpe sur son premier podium de l’année. 26 à 0, l’écart entre les deux top-teams commence déjà à sérieusement se creuser. A Imola, pour la première manche européenne, les premières évolutions apparaissent sur les monoplaces. Du côté des Ferrari, l’aile arrière est revue pour apporter davantage d’appui sur le circuit d’Emilie-Romagne. Ce ne sera pourtant pas suffisant pour ôter la pole position à Häkkinen, en tête pour à peine plus d’un dixième de seconde devant l’allemand de la Scuderia. Moins à l’aise, Barrichello qualifie sa F1-2000 au quatrième rang, derrière David. A noter cet incident lors des essais lorsque le Kaiser arriva toutes roues bloquées à son emplacement d’arrêt, percutant l’homme au lève-vite, offrant une image restée célèbre aujourd’hui. Au départ, le finlaidais décolle tel un avion de chasse et prend quelques longueurs d’avance alors que derrière, les italiennes patinent un peu. Alors que M.Schumacher protège sa position en coupant sec la trajectoire à Coulthard, Barrichello se jette à l’extérieur dans Tamburello pour ravir la troisième place à l’écossais. Rapidement, les deux leaders des deux écuries se retrouvent roues dans roues. Leur bataille, bien que sans dépassement, est sensationnelle. Les deux hommes tournent aisément plus d’une seconde plus vite aux tours que leurs équipiers respectifs, bataillant eux aussi pour la dernière marche du podium. Si la McLaren tient enfin la distance, c’est la stratégie qui choisira son gagnant. Comme en Hongrie en 1998, le génie Ross Brawn choisit d’allonger le deuxième relais et de pousser un maximum pour s’offrir un dernier arrêt express. En signant presque quatre boucles de qualifications d’affilée, le double champion allemand vole le leadership à son rival à quelques kilomètres de l’arrivée. Pari gagnant. Devant des tifosi en liesse, M.Schumacher savoure son troisième succès de rang, une première pour la Scuderia depuis l’épopée de la 312T en 1976. Les deux McLaren-Mercedes complètent le podium et ouvrent enfin leur compteur de points. Rubens sécurise la quatrième place, échouant pour quelques secondes derrière l’écossais. Le classement au championnat est on ne peut plus clair : Schumi mène avec trente points alors que son dauphin, son équipier brésilien, n’a que neuf unités à son palmarès. Le constat est le même au tableau des constructeurs. La Scuderia domine les débats avec vingt-neuf points de plus que sa rivale anglaise. Les dés sont-ils déjà jetés ? La saison ne fait que commencer après tout…

Silverstone marque le premier tournant de cette saison 2000. Après des journées du vendredi et du samedi noyées sous les eaux, Barrichello empoche sa première pole position pour la Scuderia, devançant de quatre position son équipier, visiblement peu à l’aise avec les réglages de sa F1-2000. Entre eux deux, la Jordan de Frentzen et les McLaren sont intercalées. Le grand-prix s’annonce passionnant et les premiers tours le prouveront bien. Si le double champion allemand sort large sur une bordure grasse à Stowe et perd de nombreuses places, l’autre pilote Ferrari maintient son rang et caracole en tête, emmenant dans son sillage la Jordan, les deux flèches d’argent et les deux Williams-BMW. Quelques secondes vont séparer ces monoplaces durant le premier tiers de course avant que la stratégie carburant ne finisse par décanter le classement. Pour M.Schumacher, c’est un long chemin de croix qui commence. Bloqué derrière la BAR de Villeneuve, il se retrouve contraint d’attendre une bonne opportunité pour dépasser, sa charge en essence supérieure l’empêchant d’attaquer à souhait. A la mi-course, le leader brésilien commet une erreur à la sortie de Becketts et laisse filer Coulthard mais cela va de mal en pis pour le récent poleman, touché par de nouveaux problèmes hydrauliques. Un tête-à-queue causé par un moteur coupé puis un accélérateur collé au plancher le conduiront inévitablement à l’abandon, son deuxième de l’année. La dernière machine rouge en course ne sera pas plus performante. Profitant d’un ravitaillement de moins que les Jordan et Williams, le Kaiser finit par récupérer la troisième place mais sans jamais pouvoir remonter sur les anglaises, victorieuses ce jour-là à Silverstone, dans l’ordre Coulthard - Häkkinen. La Scuderia est battue pour la première fois de l’année mais l’écart au championnat reste conséquent. Ne reste plus qu’à fiabiliser l’ensemble. En arrivant à Barcelone, la Formule 1 est sous le choc. L’avion qui transportait David Coulthard s’est écrasé suite à une avarie moteur à l’aéroport de Lyon. Si les passagers sont indemnes, les pilotes n’ont pas survécu. Bien que très secoué physiquement et psychologiquement, l’écossais reste apte à piloter, la meilleure thérapie pour oublier selon ses dires. Le tracé de Montmeló est l’un des plus délicat pour les pilotes et les ingénieurs en raison des nombreuses forces appliquées sur les hommes et les pneumatiques. La F1-2000 se montre rapidement très à l’aise, propulsant l’allemand en pole position devant Häkkinen et Barrichello. A l’extinction des feux, le pauliste se laisse déborder par R.Schumacher et Coulthard. Le classement n’évolue pas pendant de longues minutes mais les premiers arrêts aux stands vont chambouler le classement. Lors de son ravitaillement, le préposé à la sucette indique trop tôt à M.Schumacher de repartir alors que le tuyau d’essence est encore branché sur la voiture. Si le mécanicien à juste le temps de le retirer, il n’a pas le temps de s’écarter de la monoplace en mouvement. Le malheureux tombe à la renverse et se fait même écraser la cheville. L’allemand jette un œil dans ses rétros, ralenti, avant de repartir. Quelques instants plus tard, c’est l’écossais de McLaren qui peine à se relancer, laissant libre champ à Barrichello pour retrouver le top 4. Il faudra attendre les deuxièmes pit stops pour voir le classement évoluer tant les dépassements sont inexistants sur ce circuit. Mais lors de son deuxième passage aux stands, le double champion 1994 et 1995 perd un précieux temps, la faute au tuyau d’essence abîmé un peu plus tôt. Son adversaire Häkkinen en profite pour chiper le commandement et voler vers la victoire. Pas de chances non plus pour le pauliste. Reparti derrière R.Schumacher après son dernier ravitaillement, il se fait même avoir par Coulthard, arrêté un tour plus tôt. L’écossais remonte comme une balle sur la F1-2000 évoluant en deuxième position et pour cause, la voilà victime d’une crevaison lente. Dépassé avec facilité, M.Schumacher va alors jouer des coudes face à son frère, le poussant au large dans l’entrée du dernier secteur, permettant à son équipier de s’infiltrer pour lui chiper la troisième marche du podium. Une fois ce tour de force effectué, le pilote Ferrari n’a d’autre choix que de plonger encore aux stands pour changer ses gommes. Cet ultime pit-stop confirmera sa cinquième place finale, deux rangs derrière l’autre pilote Ferrari, largué à près de trente secondes de la première des deux McLaren-Mercedes. Pour le grand-prix d’Europe, sur le Nürburgring, la Scuderia amène sa première évolution moteur et espère bannir tous ces problèmes de fiabilité ayant affecté les F1-2000 depuis le début de saison. Sur la piste de l’Eifel, la météo va se montrer très capricieuse. Avec de grosses averses perturbant les qualifications, les premiers tours sont primordiaux. A ce petit jeu-là, Coulthard s’octroie la pole position devant M.Schumacher. La seconde Ferrari se place quatrième mais la pluie attendue pourrait très vite redistribuer les cartes. Si le départ est donné en conditions sèches, les premières gouttes ne se font pas attendre. Auteur d’un excellent départ, le champion sortant chipe le leadership pour mener devant son rival allemand jusqu’au premier arrêt. La piste est rapidement détrempée, un terrain de jeu idéal pour le Baron Rouge, véritable équilibriste. Sa monoplace glisse dans tous les sens mais le rythme reste plus élevé que quiconque. Sa première victoire en rouge à domicile est signée avec la manière devant les deux McLaren. Seul Häkkinen parvient à rester dans le même tour que le leader, signe de la démonstration de ces deux pilotes. Du côté de Rubinho, c’est la stratégie qui lui fera défaut. Facile troisième devant l’écossais de McLaren, un troisième ravitaillement, prévu mais pas utile selon son pilote, le fait chuter au pied du podium pour son plus grand désespoir. Après deux succès des gris, la Scuderia reprend son rang de début d’année mais sera-t-il suffisant pour reprendre le large face à une équipe anglaise plus performante en conditions normales ? La réponse à Monaco. Dans les rues de la principauté, le duel reprend de plus belle. Très habile entre les rails, l’allemand décroche la pole position devant l’étonnant Trulli et sa Jordan alors que Barrichello, moins enclin à trouver de la performance, ne se qualifie qu’en sixième position. Au moment de s’élancer, un bug informatique déploie le drapeau rouge par erreur. Quelques secondes plus tard, un accrochage entre Button et De la Rosa obstrue la piste. Huit voitures sont bloquées et la course immédiatement arrêtée. Le drapeau rouge était prémonitoire. Un second envol est décrété et contrairement au premier, Barrichello perd deux places. A l’inverse, le Kaiser vole et se ménage une avance de plus de trente secondes sur son dauphin, l’écossais David Coulthard. Le triomphe lui est destiné mais l’affaissement de sa suspension arrière-gauche de sa monoplace l’oblige à abandonner à quelques kilomètres du but. Une fissure d’un tuyau d’échappement aurait fait surchauffer le triangle de suspension. Avec ce retrait mais aussi ceux de Trulli, Frentzen, Alesi et R.Schumacher, le petit brésilien remonte jusqu’au deuxième rang mais sa course aurait pu s’arrêter lui aussi, sa suspension arrière souffrant du même problème affectant son équipier… La mi-saison approche à grands pas et la domination établie hors d’Europe par Ferrari commence à s’effriter. McLaren parviendra-t-elle à renverser la tendance ? Avec cinq points d’avance, la Scuderia prend peur…

Sur l'Île-Notre-Dame à Montréal, la Formule 1 offre un nouvel épisode de cette palpitante saison 2000. A l’issue de qualifications de nouveau très serrées, M.Schumacher retrouve le chemin de la pole position devant Coulthard et Barrichello. Au moment de s’élancer pour le tour de chauffe, les mécaniciens McLaren sont toujours affairés sur la voiture de l’écossais. Cela lui vaudra une pénalité plus tard dans la course. A l’extinction des feux, l’allemand s’envole alors que le brésilien se voit débordé par un Villeneuve plus qu’en forme chez les siens. Bloqué derrière le canadien, il mettra plusieurs tours pour enfin trouver l’ouverture et chasser son équipier, déjà loin devant. A mi-course, de gros nuages s’amoncellent autour du circuit, signe d’un orage imminent. En quelques secondes, la piste est noyée sous les eaux. La Scuderia réagit vite et stoppe ses deux pilotes coup sur coup, bien que l’arrêt du pauliste soit un poil plus long, le temps de trouver les bonnes gommes. Les deux monoplaces rouges s’envolent vers un magnifique doublé mais une sérieuse alerte semble affecter la voiture de l’allemand. Finalement, la mécanique tiendra jusqu’au bout et l’ordre établi restera le même sous le drapeau à damier, bien que l’écart soit tombé sous les cinq secondes. Cette belle prestation des italiennes au Canada laisse espérer un retour de la domination mais le retour en Europe ne sera pas aussi glorieux qu’attendu. A noter que le succès de M.Schumacher au Québec est le premier d’un poleman depuis treize grands-prix. A Magny-Cours, là où la discipline bascule dans sa seconde moitié de saison, Ferrari espère faire le break face à sa rivale anglaise. Après de longs essais et une qualifications réussies, de bons espoirs sont placés sur les deux pilotes. Poleman, M.Schumacher tasse immédiatement Coulthard au départ, laissant libre champ à Barrichello pour s’immiscer en deuxième place. Les F1-2000 évoluent aux premiers rangs mais les premiers arrêts tirent une conclusion un peu inquiétante : les pneus arrière sont très usés en comparaison avec ceux des McLaren. Après un arrêt un peu cafouillé, le brésilien ressort derrière les deux flèches d’argent et peine à trouver du rythme. Du côté de l’allemand, les gommes ne donnent guère plus de satisfaction. En quelques tours, l’écossais remonte à pleine vitesse sur le leader et tente une première attaque à Adélaïde, virilement repoussée par le double champion. Ceci ne manquera pas d’énerver DC qui le fit savoir à son adversaire par le biais d’un doigt levé. La manœuvre sera retentée quelques minutes plus tard et cette fois-ci, le dépassement est opéré. Le calvaire du Kaiser ne s’arrête pas là car après avoir été passé par Häkkinen, son V10 explose. Le leader du championnat doit mettre pied à terre, laissant sa troisième place à son équipier, lui aussi au ralenti pour éviter tout ennui sur son bloc. Le grand-prix qui devait marquer la suprématie des rouges aura tourné au cauchemar. Le mauvais rêve ne s’arrête cependant pas de sitôt avec la manche autrichienne. Sur l’A1-Ring, le duel promet car sur une piste aussi courte, les écarts sont minimes. Hélas pour la Scuderia, McLaren leur inflige une véritable claque lors de l’exercice du tour chronométré. Quatre dixièmes de retard face à Häkkinen pour le Baron Rouge, six pour Rubinho, le grand-prix s’annonce plus compliqué que prévu. Il prendra même une tournure catastrophique pour les rouges lorsqu’au premier virage, Zonta freine tard, trop tard, et emboutit la F1-2000 de l’allemand. De son côté, Barrichello se fait lui aussi tamponner par Trulli ce coup-ci, et se retrouve poussé au large dans les graviers. S’il peut s’extraire du bourbier, son équipier reste sur le carreau. A contre-sens en sortie du premier virage, il se fait percuter de face par la Jordan de Trulli, une fois encore pris dans un accrochage avec une Ferrari. L’aileron avant est arraché et la suspension avant-droite est pliée. S’il tente de repartir, le leader du championnat se rend bien vite compte que sa monoplace n’est plus en état. Dans un dernier élan d’espoir, il stationne sa monture en milieu de piste et se rue vers les stands en espérant un possible drapeau rouge et donc, un second départ. Malheureusement pour lui, c’est la voiture de sécurité qui entre en piste et en quelques secondes, les monoplaces accidentées sont retirées. L’extraction de la Benetton de Fisichella nous offrira même une scène assez cocasse lorsqu’un commissaire resta assis sur le museau de la machine bleue, alors levée à plusieurs mètres au-dessus du sol. Le seul rescapé de Ferrari reprend la piste en huitième position mais sa voiture à quelque peu souffert lors de son excursion, bien involontaire, hors-piste. Avec un rythme plutôt bon mais loin de celui des flèches d’argent, le brésilien rallie l’arrivée en troisième position, à trente secondes du vainqueur Häkkinen, vainqueur pour la première fois de l’année. A sept courses du but, les championnats sont totalement relancés et nul ne peut savoir qui sortira vainqueur de ces duels acharnés. Avec six unités d’avance sur Coulthard et huit sur son rival finlandais, M.Schumacher n’est plus aussi à son aise qu’en entame de saison. Le tableau des équipes est encore plus resserré avec un avantage de seulement quatre points pour Ferrari sur McLaren, revenue en force sur ces derniers meetings. La saison a-t-elle basculé ? Hockenheim sera un premier juge de paix.

Sur le tracé allemand, M.Schumacher est accueilli en héros par son peuple, ce qui est loin d’être le cas de certains autres pilotes. En effet, Villeneuve, Irvine et Coulthard se plaignent sans ménagement du comportement du double champion du monde, accusé de manœuvres incorrectes, notamment lors des départs avec des zigzags permanents. Ce week-end germanique sera une nouvelle fois marqué par de très nombreuses averses, perturbant toutes les séances sans exception. L’une d’elle sera fatale à la voiture du Kaiser, privé de différentiel à l’abord du Stadium. Ce dernier n’a donc d’autre choix que d’utiliser le mulet pour les qualifications mais au même moment, la F1-2000 de Barrichello lâche également. Le brésilien doit alors se reporter sur la voiture de son équipier, tout juste réparée. S’il reste longtemps dans la liste des non-qualifiés, il signe in-extremis un temps lui permettant de prendre part à la course mais au dix-huitième rang. M.Schumacher prend la deuxième place, derrière son ennemi juré Coulthard. Le départ s’annonce tendu, d’autant que la météo devrait perturber le grand-prix dans sa seconde moitié. A l'extinction des feux, les deux hommes sont côte-à-côte mais se font tous deux déborder par un Häkkinen plus prompt à s’élancer. Si l’écossais garde une trajectoire milieu de piste, l’allemand se décale à gauche pour s’offrir un meilleur élan dans la ligne droite qui suit. Hélas, derrière lui, Fisichella déboule au même moment. Le choc est inévitable et pour la troisième fois de suite, le Kaiser est hors-course, furieux. La dernière F1-2000 engagée n’a que peu de chance de remonter et pourtant, à la fin du premier tour, Rubinho pointe déjà au dixième rang. Douze tours plus tard, le voici troisième ! Au vingt-quatrième passage, surprise : la voiture de sécurité est déployée. La raison ? La présence d’un homme marchant en bord de piste, frôlé par des monoplaces lancées à plus de 300km/h. Cet inconnu est en fait un français venu pour exprimer son mécontentement après avoir été licencié sans raison par … Mercedes ! Le cafouillage est de mise et l’individu vite interpellé. Les voitures repartent regroupées mais deux minutes plus tard, un énorme accrochage comprenant Alesi et Diniz. Les pilotes sont indemnes mais l’accident aurait pu être bien plus dramatique avec tant de roues volantes à telle vitesse. La Safety Car reprend son chemin sur le circuit et neutralise l’épreuve avant de la relancer dans la foulée. Si les McLaren-Mercedes monopolisent les premiers rangs, une nouvelle perturbation va redynamiter ce grand-prix : la pluie. Le petit crachin se transforme très vite en un impressionnant orage. De nombreux pilotes, dont les deux flèches d’argent, se jettent immédiatement dans les stands pour chausser les gommes rainurées, mais par Barrichello. En effet, le vrésilien choisit de rester en piste et pour cause : toute la partie en forêt, donc protégée par les arbres, est sèche ! Avec des pneus secs légèrement rainurés, la conduite sur conditions humides reste possible, même si la prudence doit être de mise. Aussi incroyable que cela puisse paraître, le pauliste vogue sur les eaux et au bout du bout, remporte son premier grand-prix de Formule 1 après s’être élancé depuis la dix-huitième place ! Après huit saisons d’attente, Rubens Barrichello vainc le signe indien et accroche enfin son nom au palmarès de la discipline, sauvant par la même occasion la Scuderia d’une déroute certaine en Allemagne. Les deux McLaren, battues sur le fil, complètent le podium. Le championnat prend même une autre tournure puisque derrière M.Schumacher, Häkkinen et Coulthard remontent à deux points alors que Barrichello revient à dix unités de son leader. Ce résultat historique pour Rubinho ne doit pas faire oublier la série noire de son équipier qui cherche désespérément à endiguer cette mauvaise passe. Sur le sol hongrois, la douloureuse réalité de la hiérarchie refait surface. Auteur d’une splendide pole position, l’allemand ne peut contenir un Häkkinen bondissant depuis la deuxième ligne pour filer vers la victoire. S’il parvient à tenir l’autre McLaren dans ses échappements tout au long du grand-prix, ses performances n’étaient clairement pas à la hauteur des machines grises. Deuxième sous le drapeau à damier reste cependant un bon résultat si l’on regarde les dernières manches mais avec le succès du finlandais, les championnats changent de main. C’est désormais Mika qui mène devant le Baron Rouge alors qu’au classement des équipes, McLaren reprend la tête pour un minuscule point. La course de Barrichello fut monotone du début à la fin. Bloqué derrière la Williams-BMW du Schumacher cadet, il récupère la quatrième place au gré des arrêts sans réel combat. Ce tracé exigüe, pourtant semblable à Monaco, n’aura pas réussi aux F1-2000, la faute aux réglages selon les pilotes. A cinq meetings de la fin, l’alarme commence à résonner à Maranello. Fin Août, la Formule 1 pose ses valises en Belgique pour la fameuse manche de Spa-Francorchamps. Toujours à l’aise sur cette piste qui l’a vu débuter, M.Schumacher veut retrouver le chemin de la victoire en terres ardennaises. Malheureusement, la Scuderia ne trouve pas les bons réglages. Véloce en ligne droite mais peu stable dans le deuxième secteur, la monoplace de Maranello a vu son setup totalement évoluer en une journée, devenant enfin rapide dans la section sinueuse mais plus lente en ligne droite. Ces compromis ne font pas de miracles sur un tour, si bien que les deux F1-2000 sont reléguées aux quatrième et dixième rang de la grille, leur plus mauvaise performance groupée de l’année. Par chance, les conditions sont humides au moment de démarrer le grand-prix. Tous les pilotes partent avec les gommes intermédiaires mais en quelques tours, la trajectoire s’assèche. M.Schumacher, remonté en deuxième position, se lance à la poursuite de Häkkinen mais la McLaren est bien plus performante ce jour-là. Pour autant, le finlandais n’a pas course gagnée, surtout lorsqu’il perd bêtement le contrôle de sa machine à l’entrée de Stavelot, laissant le champ libre au double champion allemand pour le leadership. Les boucles s’égrainent et l’écart entre les deux protagonistes diminue jusqu’à passer sous la seconde à cinq tours du but. Après une première tentative repoussée au bout de la ligne droite de Kemmel, celle du quarante-et-unième passage est la bonne. Blotti dans les échappements de la Ferrari, le finlandais profite de l’aspiration offerte par l’attardé Zonta pour déboiter par la droite la BAR et l’italienne, partie quand-à-elle sur la gauche. L’image de ces trois monoplaces côte-à-côte, lancées à plus de 300 km/h, est aujourd’hui devenue mythique. Le dépassement de la décennie venait d’être opéré. Sans pouvoir lutter plus longtemps, le Baron Rouge s’incline pour une petite seconde sous le drapeau à damier, conscient d’avoir perdu une opportunité de reprendre la tête du championnat. L’écart se porte désormais à six points à l’avantage de Häkkinen, seul homme à encore réellement pouvoir faire échouer l’allemand. Du côté de Barrichello, la malchance qui l’avait laissée de côté depuis quelque temps refait surface. Cette fois, c’est la chute de la pression d’essence qui sera responsable de son abandon, son troisième de l’année.

A quatre meetings du terme de cette saison 2000, personne ne sait qui va pouvoir l’emporter. Les performances entre les McLaren et les Ferrari sont relativement proches et si les flèches d’argent semblent avoir un léger avantage, les italiennes disposent de nouvelles améliorations. Cela se ressent très vite avec un doublé en qualifications sur la piste à domicile de Monza, de quoi ravir les milliers de tifosi venus sur place acclamer leurs héros. Le circuit italien qui s’est vu doté d’une nouvelle première chicane, bien plus serrée et lente que l’ancienne version, d’où un risque accru d’accidents au départ. Pourtant, c’est le deuxième enchaînement qui fera le plus de victimes. En arrivant dans la zone de freinage, Frentzen pulvérise sa monture sur celle de son équipier, emportant avec lui la Ferrari de Barrichello et la McLaren de Coulthard. Derrière ce carnage, De la Rosa expédie son Arrows dans une série de pirouettes avant de lourdement retomber sur le flanc de la flèche d’argent détruite. De nombreux débris parsèment le bitume mais le grand-prix n’est pas interrompu pour autant. C’est la voiture de sécurité qui viendra neutraliser l’épreuve. Rapidement, de bonnes nouvelles concernant la santé des pilotes émanent des premiers échos mais hélas, un commissaire n’aura pas cette chance. Touché par une pièce volante, il décédera peu après de ses blessures. Au moment de relancer la course, le leader M.Schumacher freine un grand coup pour couper l’élan de la meute avant d' accélérer pied au plancher. A ce petit jeu-là, Button se fait surprendre, faisant un grand écart, allant même jusqu’à taper les rails et causer son abandon. La manœuvre de l’allemand est critiquée mais rien ne l’interdit formellement. Devant un public déchaîné, le Kaiser enchaîne les tours rapides et même si son grand rival finlandais navigue tout près de lui, aucune attaque ne lui sera adressée. Après cinquante-trois boucles haletantes, M.Schumacher remporte son quarante-et-unième succès en Formule 1, devenant l’égal de Senna. Lorsque ce moment d’histoire lui est rappelé en conférence de presse, l’allemand éclate en sanglots aux côtés de Häkkinen et de son frère cadet, troisième du grand-prix. Lui seul avait réellement bataillé avec Magic Senna sur tous les pilotes de la grille actuelle. Cette victoire n’est pas qu’émotionelle puisqu’elle remet la Scuderia dans le droit chemin après une si longue domination des anglaises. Les championnats se resserrent une fois encore et l’issue demeure plus incertaine que jamais. La saison européenne s’achève mais avant de clotûrer cette folle année en Asie, la F1 fait escale aux Etats-Unis, une première depuis 1991. Quel meilleur circuit la discipline aurait-elle pu choisir que celui d’Indianapolis pour étoffer sa popularité outre-Atlantique. Si l’ovale est emprunté le temps d’un virage, c’est un nouveau tracé, appelé Infield, qui s’offre aux pilotes. Tout le monde est conquis et le spectacle s’annonce grandiose. Très rapidement, les F1-2000 dévoilent leur pointe de vitesse déjà entrevue à Monza. Il faut dire qu’avec une zone de pleine charge de presque vingt secondes, les compteurs s’affolent. Comme en Italie, c’est M.Schumacher qui s’élance depuis la première place, trois rang devant Barrichello. Le départ, sur piste humide, sera très animé, notamment avec le départ volé de Coulthard, leader mais coupable. L’écossais tiendra son adversaire allemand quelques tours avant que la Ferrari ne vienne enrouler par l’extérieur du premier virage la monoplace grise, non sans un petit contact. Ce dépassement ne fait que resserrer l’écart entre le Baron Rouge et le champion finlandais, revenu sur ses pas. Mais quelques instants plus tard, c’est la stupéfaction : le moteur Mercedes de Häkkinen part en fumée, emportant avec lui ses probables chances de titre, désormais dévolues à Schumacher. Ce dernier, pourtant bien installé en tête, ne se repose pas pour autant sur ses lauriers et commet même une rare erreur de pilotage avec une petite pirouette dans le gazon, sans gravité. Avec un deuxième triomphe de rang, juste devant son équipier, le voilà revenu en haut du classement des pilotes avec la possibilité de tout plier dès le Japon. Le constat est le même au tableau des constructeurs. La Scuderia semble plus proche que jamais de glaner un second titre consécutif mais rien n’est jamais acquis avant la fin. Première balle de match à Suzuka. Sur le tracé nippon, les deux protagonistes mènent un train d’enfer. L’écart en qualifications n’est que de neuf millièmes, à l’avantage de l’allemand alors que Barrichello n’est que quatrième. Suir une piste pas totalement sèche, Häkkinen prend la tête dès le départ, suivi comme son ombre par Schumacher. Une deuxième place assurerait le titre pilote mais le Kaiser a toujours faim de victoire. Très vite, les deux rivaux s’échappent au rythme d’une seconde plus vite que quiconque sur la piste. Le duel est fantastique mais au trente-septième tour, il prend une autre tournure. Attaquant comme un fou avant de s’arrêter pour la dernière fois, le double champion allemand réalise l’opération parfaite et ressort devant la McLaren. Tout aura été optimisé jusqu’à la fin et sous le drapeau à damier, M.Schumacher remporte le grand-prix mais aussi et surtout, arrache le titre des pilotes, une première pour un pilote de la Scuderia depuis Scheckter en 1979 ! Barrichello termine quatrième et empoche de précieux points pour la dernière des luttes : le championnat constructeurs. C’est à Kuala Lumpur que la saison 2000 prend fin et comme depuis le début de l’année, deux écuries se détachent. Après avoir obtenu la pole position, le nouveau roi de la F1 se fait déposer dès le départ par Häkkinen et pour cause, le finlandais a décollé avant l’extinction des feux. Une erreur de Coulthard plus tard et voilà que la première place retombe dans l’escarcelle de la Scuderia jusqu’au drapeau à damier. Avec une première et troisième position finale, le sacre est acté.

Nouveau millénaire rime désormais avec nouvelle ère pour Ferrari. Passée tout proche depuis 1997, la Scuderia retrouve enfin le sommet de la hiérarchie grâce à ses pilotes M.Schumacher et R.Barrichello, mais aussi grâce à la flamboyante F1-2000. Bousculée en cours de saison, la monoplace italienne aura su renverser la tendance au moment où il le fallait. La fiabilité, point noir de la machine en entame de campagne, s’est peu-à-peu améliorée pour former les résultats que l’on connait aujourd’hui. Le retour des deux couronnes à Maranello reste un exploit qui se sera fait attendre très longtemps, trop longtemps sûrement. Le travail acharné abattu par l’équipe, des ingénieurs au stratège, aura enfin payé. Au final, la F1-2000 s’imposa à dix reprises, démarra dix fois de la première place, permit à ses pilotes de grimper sur vingt-et-un podiums et de réaliser cinq meilleurs tours en course. Malheureusement pour la concurrence, l’hégémonie rouge ne faisait que commencer…

La Ferrari F1-2000 en chiffres...

Grands-prix :

17

Victoires :

10

Podiums :

21

Poles Position :

10

Meilleurs Tours :

5

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