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Sauber C31

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Quand un outsider vient perturber les plans des grosses structures, les résultats s’en retrouvent chamboulés. C’est ce qui se passa en 2012 avec la Sauber C31.

Après une saison 2011 peu attrayante du fait de la domination de Vettel et Red Bull, la Formule 1 plonge vers 2012 et sa réglementation quelque peu changeante. Si quelques points techniques sont modifiés, l’un d’entre eux suscita l’indigenement de tous les fanatiques au moment de la présentation des monoplaces : les museaux abaissés. Requis pour prévenir d’un éventuel choc latéral, ces nouveaux nez sont finalement très disgracieux, formant une véritable marche entre le museau et le devant du cockpit. Seule McLaren, avec son nez plongeant, épargne les supports de ces appendices laids. Chez Sauber, le choix de la forme est simple : un long nez plat qui porte l’aileron avant suivi d’un épaulement proéminent, très différent du museau haut et pointu de la voiture de 2010. Sous sa robe blanche et noire, la C31 cache un V8 Ferrari de 2,4L, développant plus de 700cv. Les espoirs de Peter Sauber ne sont pas élevés pour cette campagne 2012 mais la venue des nombreux sponsors mexicains de Sergio Perez et du troisième pilote Esteban Gutiérrez ne font qu’augmenter le budget alloué au développement de la voiture. Depuis son retour officiel en 2010, l’écurie n’a jamais retrouvé le podium, son dernier datant déjà de neuf ans…

Comme à son habitude depuis 1996, la saison s’ouvre en Australie, sur le tracé urbain de Melbourne. Les résultats ne sont jamais vraiment représentatifs ici mais pour Sauber, tout commence plutôt bien. Malgré des qualifications quelque peu décevantes, Perez et Kobayashi parviennent à remonter jusque dans les points, achevant leur première course en sixième et huitième place. Mais c’est à Sepang que l’histoire rêvée de la C31 débuta. En Malaisie, il y une chose que les pilotes et écuries redoutent : les orages. Malheureusement pour eux, la pluie est bien présente. Le départ est humide mais tout le peloton, à l’exception des HRT, s’élance en pneumatiques intermédiaires. Ce choix ne sera pas le plus judicieux puisque dès le premier tour, le ciel laissa tomber des trombes d’eau. Pour autant, personne ne songe à rentrer, sauf Perez, tentant un coup de poker en prenant les gommes pluies. La stratégie est payante : quelques tours plus tard, tout le monde l’imite et le petit mexicain remonte au troisième rang, juste avant que la voiture de sécurité ne prenne la piste. Le tracé est inondé en quelques secondes et le souvenir de 2009 fait craindre à une nouvelle fin de grand-prix prématurée. Mais après de longues minutes d’attente, la pluie cesse, offrant aux pilotes la possibilité de démontrer leur talent sur l’eau. Devant Perez, les deux McLaren caracolent en tête mais en l’espace de trois boucles, plusieurs ennuis vinrent compromettre les plans de l’écurie de Woking. La Sauber se retrouve donc en première place, talonnée par la modeste Ferrari d’Alonso. Les deux ne se lâcheront plus d’une semelle jusqu’à la fin du grand-prix. Avec une piste séchante, les écuries rappellent leurs pilotes pour chausser les intermédiaires, puis les slicks une fois la trajectoire bien propre. Si le champion espagnol reste devant, le mexicain remonte comme une fusée et à six tours du but, il est à moins d’une seconde du leader. C’est alors que la Sauber partit au large en entrant dans la partie finale du circuit. Avec plus de cinq secondes de perdues, la victoire s’est envolée. L’espagnol remporte finalement une course folle et imprévisible mais derrière lui, à deux petites secondes, surgit le brillant Perez, héros du jour sur sa Sauber. Tout le clan suisse est en fête après cette performance inattendue. Certes, la pluie aura grandement influé sur le résultat mais la prouesse du mexicain aura bel et bien impressioné le paddock. Hélas, les meetings se suivent mais ne se ressemblent pas. En Chine, puis à Bahrein, l’écurie suisse peine à trouver de bons réglages et leurs pilotes restent enfermés en deuxième moitié de plateau. Peter Sauber le sait, ce coup d’éclat risque d’être le seul de l’année…

A Barcelone, les premières évolutions apparaissent sur les voitures et la Sauber ne déroge pas à la règle. Mais ce week-end là, c’est une autre écurie qui tire son épingle du jeu : Williams et l'inimitable Pastor Maldonado. Si Perez renonce sur ennui de transmission malgré une belle cinquième place sur la grille, Kobayashi démontra une nouvelle fois le potentiel de sa monture en achevant la course catalane au cinquième rang après un management des pneumatiques exemplaire. Cet élément sera d’ailleurs la clé de la réussite pour l’équipe suisse tout au long de cette saison 2012. La manche suivante se dispute sur l’exigu tracé de Monaco. L’année passée, le mexicain fut victime d’un effroyable crash à la sortie du tunnel en qualifications, l’obligeant à déclarer forfait pour la course. Cette fois encore, il commit l’irréparable en tapant les barrières dès l’entame de séance, le poussant à débuter en fond de grille. Si son équipier rate de peu le top 10, sa course fût bien courte. Après l’accrochage entre Grosjean et Schumacher, Kobayashi tenta d’éviter la Lotus. Il y parviendra presque mais un léger contact entre sa roue arrière gauche et la roue arrière droite de Grosjean le propulsa dans les airs, offrant un cliché mémorable. Les suspensions furent bien touchées dans l’incident, l’abandon fut donc inévitable. Si Perez glane quelques positions, ce n’est pas suffisant pour assurer les points. Sur le circuit Gilles Villeneuve, la lutte pour la victoire est indécise. Avec six vainqueurs différents en autant d'épreuves, tout peut arriver. Alors que les course canadiennes sont souvent jugées sur la vitesse et la tenue des freins, celle de 2012 fut dictée à l’usure pneumatique. A ce jeu là, c’est Hamilton qui en sort vainqueur, devenant le septième homme différent à s’imposer de suite. Pourtant, il fut longtemps chassé par Alonso et Vettel, tous deux sur une stratégie différente. Mais dans le dernier tiers de course, tout bascula pour eux. A cause d’une dégradation trop forte, les deux champions voient leur rythme s'effondrer alors que derrière eux, Perez, et surtout Grosjean, volent sur la piste. En quelques tours, les deux avalent la Red Bull et la Ferrari et foncent sur Hamilton, lui aussi en délicatesse avec ses gommes. L’écart se réduit comme neige au soleil mais hélas pour eux, l’épreuve s’acheva un ou deux tours trop tôt. Pour Sauber, c’est un nouveau grand moment avec cette troisième place du mexicain, présent une deuxième fois dans le top 3 cette année. A Valence, pour le grand-prix d’Europe, l’écurie suisse ne se fait pas d’illusion, sa monoplace n’est pas la plus adaptée pour les circuits urbains lents. Pourtant, la course est ponctuée de nombreux incidents et rebondissements mais aucun d’entre eux ne permet aux voitures blanches et noires de remonter dans le classement. Pire, Kobayashi finira même par renoncer après s'être bêtement accroché avec Massa lors d’une relance. Les résultats de l’équipe sont en dents de scie mais la bonne tenue des pneumatiques fait rêver de nouveaux podiums, ou même de victoire. Reste à corriger le point faible : les qualifications.

Le problème pour Sauber, c’est la mise au point des monoplaces. Si elles sont économes en gommes, elles ne sont pas assez performantes sur un tour lancé. A Silverstone, elles se qualifient au-delà de la quinzième place et ne parviendront pas à accrocher le moindre point, Perez se faisant même sortir par un Maldonado des grands jours. En Allemagne, les qualifications, pluvieuses, sont toutes aussi catastrophiques. Mais le dimanche, le soleil est de retour et les C31 sont revigorées. Alors qu’elles démarraient en seconde moitié de grille, leur incroyable rythme leur permit de remonter dans le top 5 en l’espace d'une quinzaine de tours. Les arrêts aux stands modifièrent le classement au fur et à mesure que l’épreuve avançait mais sur la ligne, les deux montures suisses restent aux avant-postes, Kobayashi cinquième, Perez sixième. Le japonais héritera même de la quatrième place après la pénalité de temps infligée à Vettel pour dépassement hors-piste, soit son meilleur résultat en Formule 1. Cela faisait longtemps que l’écurie de Peter Sauber n’avait pas autant été à la fête mais en Hongrie, circuit lent et sinueux, les performances s’effondrèrent. La claque est violente mais le team sait que les deux manches suivantes ne leur seront que favorables. Reste à concrétiser de nouveaux gros résultats. Les traditionnelles vacances d’été coupent en deux cette folle saison avant la reprise sur le mythique tracé de Spa-Francorchamps. Et là, miracle. Les C31 sont presque les meilleures voitures du plateau, Kobayashi s’élançant second, Perez quatrième. A ce moment précis, beaucoup tablent sur un succès des suisses mais ce qui se passa fut une réelle tragédie. Outre le départ complètement volé de Maldonado, c’est Grosjean qui deviendra l’élément perturbateur. Avant l’épingle de la source, le français se rabat sur Hamilton qui n’a d’autres choix que d’empoigner la Lotus. Les deux voitures, incontrôlées et incontrôlables arrivent à pleine vitesse sur les leaders. Le crash est inévitable : le français escalade la monoplace de Perez tandis qu’Alonso puis Hamilton montent sur celle de Kobayashi. En cinq secondes, tous les espoirs furent réduits à néant, triste retour à la réalité pour Peter Sauber.

Sur l’ultra rapide tracé de Monza, tout le monde espère revoir les Sauber aussi bien placées, mais finalement, elles échoueront au cœur du peloton en qualifications. Si la stratégie à un arrêt est celle envisagée, l’usure des pneumatiques devrait avoir son importance en fin de relais. Pour cette raison, Perez fait le choix de s’élancer en gommes dures avant de terminer en médium, à l’inverse de la concurrence. En se décalant par rapport à la concurrence, le mexicain revient comme une balle sur le devant de la scène dans les derniers tours, effaçant les deux Ferrari avant de grappiller du terrain sur Hamilton. Mais comme au Canada, l’épreuve se termine trop tôt et le pilote Sauber échoue à quatre petites secondes de la première place. C’est déjà son troisième podium cette année-là, un record pour l’écurie suisse. A Singapour, la C31 n’est pas à l’aise, comme sur tous les tracés lents et sinueux de l’année. Perez inscrira le point de la dixième place, maigre consolation après un week-end très compliqué. Arriva ensuite le circuit de Suzuka, exigeant pour les pneumatiques mais surtout pour les pilotes. La moindre faute se traduit en abandon. C’est d’ailleurs ce dont fut victime le mexicain après une manœuvre osée de dépassement à l’épingle, se traduisant par un abandon dans le bac à graviers. Pourtant, tout souriait jusque-là aux Sauber. Troisième et cinquième sur la grille, elles auraient pu achever leur course dans le top 3 mais l’erreur de “Checo” priva le team suisse d’un premier double podium historique. Restait alors Kobayashi, longtemps sous la menace de Button pour la troisième place. Au bout des cinquante-trois tours de course, c’est la délivrance. Le japonais grimpe enfin sur le podium, son unique en Formule 1, chez lui, au Japon. Ce n’est que le troisième pilote provenant du pays du soleil levant à réaliser cet exploit, après Sato en 2004 et Suzuki en 1990, ici même. Mais si Kobayashi rêve sur le podium avec la clameur du public ovationnant Kamui, le japonais retomba durement sur terre lors du grand-prix suivant, en Corée du Sud, harponnant bêtement Button dans le premier tour. La belle série de Peter Sauber semblait finie, la fin de saison lui donna raison.

A quatre courses du but, l’issue du championnat est incertaine du côté des pilotes. Détenteur d’une belle avance au classement, Alonso voit cependant rapidement revenir Vettel après ses deux abandons en Belgique et au Japon. Du côté de Sauber, il n’y a plus rien à espérer désormais. Les multiples podiums, aussi inattendus soient-ils, ont ravis l’équipe qui désire à tout prix conserver sa sixième place au championnat constructeur, un résultat que l’écurie suisse n’avait plus réussi depuis 2004. Après un grand-prix à oublier en Inde, l’équipe se rend à Abou Dhabi, théâtre d’une course particulièrement agitée. Kobayashi profita bien de tous ces incidents pour tenir la sixième place mais pour ce qui est de Perez, les dépassements dans le peloton lui furent fatals. Dans la deuxième moitié d'épreuve, un combat un peu trop rapproché avec Di Resta provoqua son tête-à-queue alors que derrière lui, Grosjean, qui voulait éviter la Sauber en perdition, se décala sur la gauche, arrachant la suspension de Webber qui se trouvait là, encore au mauvais moment. Sur le tout nouveau tracé d’Austin aux Etats-Unis, les C31 ne se montrent pas du tout à l’aise, n’inscrivant pas un seul point. La situation au championnat semble jouer et plus personne ne semble en mesure d’inquiéter les suisses. Mais à Interlagos, Force India, et surtout Hulkenberg, mirent en péril le capital points de Sauber en menant la course un long moment. D’autant plus que dès le premier tour, les espoirs des voitures blanches et noires s’envolèrent. Dans son accident avec Vettel, Senna arracha également l’aileron arrière de Perez, mettant fin à la folle saison du mexicain. Finalement, la pluie viendra perturber le grand-prix et redistribua toutes les cartes, profitant notamment à Button. Kobayashi évita les embûches et les gouttes pour terminer au neuvième rang, de quoi assurer cette sixième place bien méritée.

Au final, la Sauber C31 n’aura pas remporté de course, n’aura pas réalisé de pole position, mais elle aura inscrit deux meilleurs tours et surtout, quatre podiums totalement inespérés. Cette performance ne passa pas inaperçue au sein du paddock, surtout pour Perez qui se vit offrir un volant chez McLaren pour 2013 : grossière erreur. Pour Kobayashi, moins de chance, le malheureux japonais ne trouvant pas de volant pour l’année 2013. Pour Sauber, la suite n’est pas forcément plus réussie. Peu de points en 2013 malgré le changement de gommes en cours de saison et plus un seul podium jusqu’à son rachat par Alfa Roméo en 2019.

La Sauber C31 en chiffres...

Grands-prix :

20

Victoires :

0

Podiums :

4

Poles Position :

0

Meilleurs Tours :

2

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