Circuit de Jeddah - Arabie Saoudite
Un Monza entre les rails ? Tel est le pari très osé de l'Arabie Saoudite et son tracé de Jeddah...
L'idée d'un circuit au sein du Golfe Arabique est loin d'être une idée nouvelle. Après Bahreïn en 2004, Abu Dhabi en 2009 ou le Qatar en 2021, c'est au tour de l'Arabie Saoudite d'organiser son propre grand-prix, une idée pas toujours appréciée par les fans. La raison derrière ces mécontentements c'est l'absence de "vrais" circuits. Terrains plats, tracés artificiels peu spectaculaires et perdus au milieu du désert, la carte postale est loin de faire rêver. L'annonce de l'organisation d'une nouvelle course au Moyen-Orient aura donc fait grincer des dents mais la piste de Djeddah ne fait rien comme les autres. Suivant la mode des circuits urbains rapides initiés par Singapour et Bakou, le tracé arabe, conçu par le fils d'Hermann Tilke, se veut être le plus rapide mais aussi le plus spectaculaire. Pour ce qui est de la vitesse, rien à dire. Les freins ne sont que très peu utilisés, la majorité des virages se prennant à fond absolu. Il faut dire qu'avaler les 27 virages des 6,174km de la piste en moins de 90 secondes demande du courage. Si les caméras embarquées sont impressionnantes, il subsiste un problème et pas des moindres : la sécurité. Peu de dégagements, des murs en béton pour limiter la piste, des virages en aveugles, voilà de quoi ramener la Formule 1 à ses standards des années 80. Les images des premiers essais font d’ailleurs froid dans le dos. Les pilotes à l’assaut du chrono se retrouvent coincés entre le mur et les voitures plus lentes, le tout, à l’aveugle bien évidemment. Si la FIA avertit les équipes sur le fait de ne pas trop ralentir dans les derniers virages, un accident reste malheureusement à craindre. Face au danger, les pilotes sont unanimes : Djeddah leur fait prendre bien trop de risques. Un mix de Monza et Monaco, l’idée était déjà folle sur le papier mais en réalité, elle est démentielle. Reste que le spectacle est garanti. Pour la première édition, en 2021, le grand-prix fut tout simplement fou. Après une séance de qualifications rocambolesque voyant Verstappen percuter le mur en sortie de dernier virage alors qu’il détenait la pole position, finalement dûe à son rival Hamilton, la course démarre. Le cœur est pourtant lourd en Arabie Saoudite puisque que quelques jours avant l’avant-dernier meeting de l’année, Frank Williams nous quittait. Une cérémonie en son hommage est alors organisée avant le départ, dernier de l’ère Todt pour ce qui est de la présidence de la FIA. Les bolides finissent par s’élancer mais après une dizaine de tours, Schumacher sort violemment de la piste. Sa Haas est disloquée et le grand-prix est interrompu. Verstappen profite de cet arrêt pour changer de gommes et récupérer la tête mais au moment de repartir, c’est son rival anglais qui semble prendre l’avantage au premier virage. Le hollandais ne démord pas et tasse la Mercedes à l’extérieur après avoir bien court-circuité la chicane. Cet incident permet alors à Ocon de prendre la deuxième place mais derrière, c’est le chaos : Perez est l’innocente victime d’un carnage qui mettra pas moins de trois voitures sur le carreau avec en prime, une nouvelle interruption. Ces accidents étaient malheureusement prévisibles mais l’épreuve reprend son cours habituel quelques minutes plus tard. Problème, l’ordre de la grille est sujette à discussion. En effet, Verstappen, a priori poleman, a bien dépassé Hamilton en dehors des limites et devrait donc le laisser passer. Mais entre les deux hommes, il y a Ocon. S’en suit une séquence mémorable avec Michael Masi, proposant des pactes aux écuries pour reformer une grille étonnante : Ocon premier, Hamilton deuxième, Verstappen troisième. Cet ordre sera bousculé dès le premier virage avec un freinage extrêmement agressif du néerlandais mais la Mercedes demeure plus véloce. En quelques tours, l’anglais raccroche la Red Bull et porte une attaque dans la ligne droite des stands. Verstappen, toujours aussi agressif, résiste au maximum mais finit par couper le premier virage, entraînant Hamilton. La logique voudrait que les positions soient inversées mais le hollandais n’en a que faire. Pourtant, dans le dernier enchaînement, le pilote Red Bull lève le pied en milieu de piste. Ne sachant pas où aller, la Mercedes louvoie derrière jusqu’au moment où Verstappen assaille un violent coup de frein, causant l'accrochage des deux monoplaces en pleine ligne droite ! Finalement, le hollandais sera pénalisé et laissera filer son rival pour la victoire. La bataille pour le podium se jouera jusque dans les derniers mètres avec un Bottas opportuniste, profitant du surplus de puissance de son bloc allemand pour coiffer, sur la ligne, l’Alpine d’Ocon.
2021
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2022 sera moins énervée, du moins en piste. En effet, la politique viendra gâcher le spectacle. Lors de la première séance d’essais libres, un missile s’écrase sur un dépôt pétrolier à quelques kilomètres du circuit, plongeant le paddock dans une sorte de terreur. Bon nombre de journalistes quittent les lieux peu après l’attaque mais pour la FIA, pas question d’annuler l’épreuve. De longues heures de discussions entre les autorités et les patrons d’écurie en découlent. Les pilotes eux aussi se réuniront et même si chacun dit vouloir courir, l’anxiété et l’incertitude se font clairement ressentir sur les visages. La sécurité ne concerne désormais plus que la piste mais les environs, encore un revers pour l’Arabie Saoudite. Cette année-là, les qualifications sont marquées par le très gros crash de Mick Schumacher, pulvérisant sa Haas après avoir escaladé un vibreur. Le choc est tel que la boîte s’arrache du châssis, exactement comme à Monaco quelques semaines plus tard. Le pilote allemand est indemne mais sa voiture ne sera pas réparée pour la course. Une course qui verra, pour la première fois, Perez s’élancer en pole et ce, après 214 départs, un record ! Malheureusement, le mexicain ne profitera pas longtemps de cette place de choix, piégé par la stratégie Ferrari et l’accident de Latifi. Pas de drapeau rouge cette fois-ci, ce qui n’empêchera pas la magnifique bataille Leclerc-Verstappen jusqu’à l’arrivée. Les deux hommes resteront propres du début à la fin, jouant au chat et à la souris pour pouvoir récupérer le DRS. Finalement, c’est le néerlandais qui aura le dernier mot mais pour à peine plus de cinq dixièmes sous le drapeau à damier. A noter également la lutte fratricide entre les deux Alpine roses, de quoi donner de bonnes sueurs froides sur tout le muret tricolore. Pour 2023, de nouveaux travaux sont prévus de manière à améliorer sécurité et spectacle. Est-ce-que cela sera suffisant pour éviter une catastrophe ? Espérons-le. Un autre problème se présente également pour la piste arabe : les dépassements. Même si le DRS permet bon nombre de manœuvres, il est juste impossible de tenter autre chose hors d’une zone d’activation. Les freinages n’en sont pas, même l’épingle en banking ne permet pas de doubler tant les monoplaces évoluent vite. Contrairement à 2021 et 2022, 2023 fut étonnement calme. Les pilotes commencent à maîtriser ce dangereux circuit et les risques pris sont mieux calculés. Cette année-là, Verstappen se voit piéger dès la Q2, la faute à un arbre de transmission fatigué. C’est une nouvelle fois Perez qui accroche la pole devant l'indomptable Alonso. Le taureau des Asturies qui prendra le commandement à l’extinction des feux avant de se faire reprendre son dû très rapidement, ne pouvant lutter face à de Red Bull invincibles. Le doublé des autrichiens est rapidement assuré lors d’un grand-prix particulièrement sage.
2022
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Le circuit de Djeddah est encore trop récent pour réellement déceler son plein potentiel. S’il est extrêmement rapide et technique, sa dangerosité reste un point négatif non-négligeable. Certes, le sport automobile et la Formule 1 ne sont pas sans risques mais faire évoluer des bolides à plus de 320 km/h entre des murs de béton n’est pas à prendre à la légère. En cas de contact avec le mur à une telle vitesse, les dégâts seront colossaux. Et quid de la différence de vitesse des monoplaces en qualifications ? Le pire a déjà été évité de justesse, heureusement…
Le circuit de Jeddah en chiffres...
Années de présence en Formule 1 :
2021 - Aujourd'hui
Longueur :
6.174 km
Nombre de tours :
50
Meilleur temps en qualifications :
1'27"472 (Verstappen - 2024)
Meilleur temps en course :
1'30"734 (Hamilton - 2021)