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Andrea De Cesaris

Se faire une réputation en Formule 1 est souvent gage de bonnes performances, enfin, pas pour tout le monde. N’est-ce-pas Andrea de Cesaris ?

Le jeune De Cesaris débute très tôt la compétition automobile. Disposant de parents proches du groupe Philip Morris, auquel appartient Marlboro, l’italien n’aura jamais de problèmes financiers. C’est donc en karting que son aventure sur quatre roues débute et les premiers résultats sont plutôt convaincants. Les titres mondial junior et italien en poche, il s’exile au Royaume-Uni pour concourir dans le relevé championnat de Formule 3. Là encore, il y démontre une certaine pointe de vitesse mais face à des Nelson Piquet ou Derek Warwick, il a fort à faire. Il se relance donc à l’assaut de la couronne en 1979 et là, les résultats tombent enfin. Victorieux de six courses, il finira par échouer au deuxième rang, derrière Chico Serra. La raison ? Un trop grand nombre d'abandons et d'accidents, un fait qui le suivra tout le long de sa carrière. En parallèle, il s’essaye à la Formule 2 mais sans vraiment de succès. En 1980, il retente sa chance en F2, remportant le grand-prix de Misano. Dans le même temps, il disputera quelques courses dans le petit championnat de Formule Pacific avec deux succès au compteur. Sa carrière commence à prendre de l’importance mais est-ce que son talent sera suffisant pour atteindre la Formule 1 ? Très probablement selon Alfa Romeo qui cherche activement un pilote pour clore cette saison 1980 après le départ de Vittorio Brambilla. Pour autant, il n’y a pas que le talent qui intéressait le team italien, l’argent amené par son partenaire cigarettier aide beaucoup. Voilà donc qu’Andrea de Cesaris, pilote bouillant mais rapide, débarque dans le grand cirque de la Formule 1.

C’est donc le 28 Septembre 1980 que le jeune romain entame sa longue carrière à haut niveau. L’Alfa Romeo 179 s’est sensiblement améliorée en fin de saison, devenant l’une des monoplaces les plus rapides avec les Williams et Brabham, bien que la fiabilité soit catastrophique. Pour sa première sortie, De Cesaris brille avec le huitième temps des qualifications, une belle prouesse à bord d’un monstre de puissance inconnu il y a encore quelques jours. Sa course ne sera pas très longue, huit tours seulement, un problème moteur venant sceller son sort alors qu’il évoluait au septième rang. A Watkins Glen, dernière de l’année, son équipier Giacomelli se hisse en pole position, neuf places devant la nouvelle recrue qui continue d’étonner. Son périple durera cependant moins longtemps qu’au Canada, un accrochage avec Daly interrompant déjà sa fin de saison. Certes, l’aventure aurait pu être sans suite mais un certain Ron Dennis, nouveau dirigeant de McLaren et ancien patron de l’italien en catégorie inférieure, tient à lui faire une proposition. Associé au vétéran John Watson, il aura la lourde tâche de faire débuter une monoplace révolutionnaire en Formule 1 : la McLaren MP4/1 et sa coque en carbone. Mais dans un premier temps, seule l’ancienne M29F lui sera pourvue, sûrement un mal pour un bien. Car De Cesaris à un problème : il casse beaucoup trop de monoplaces. Cela commence par le grand-prix d’Afrique du Sud “pirate” car non approuvé par la FOCA, en pleine guerre avec la FISA d’Ecclestone. Le premier vrai rendez-vous se tient dans les rues de Long Beach, en Californie mais là encore, l’italien jouera trop avec le feu. Avant même le premier virage, il freine bien trop tard et emboutit la Renault de Prost et la Brabham de Rebaque. Touché par un souci d’allumage au Brésil, il rallie enfin l’arrivée à Buenos Aires mais à deux tours des vainqueurs. Il lui faudra attendre le meeting d’Imola pour enfin voir son coup de volant éclater au grand jour. Sur une piste détrempée, il remonte du quatorzième au sixième rang, décrochant son premier point en passant la ferrari de Villeneuve dans l’avant-dernière boucle. S’il est fier de son résultat, il lui faudra attendre une course de plus pour que lui soit attribuée la nouvelle MP4/1. La dernière sortie de cette ancienne machine ne sera pas couronnée de succès : vingt-troisième en qualifications puis abandon sur bris de boite de vitesse au bout de quatorze tours, voilà une retraite bien attendue. L’italien découvre donc sa nouvelle monoplace lors de son premier grand-prix de Monaco. S’il se qualifie juste derrière son équipier, il commettra l’irréparable en touchant Watson dans la montée de Sainte-Dévote, harponnant par la suite l’Alfa Romeo d’Andretti. De Cesaris n’ira pas plus loin, au grand dam de Dennis qui commence à compter le nombre de carrosserie abîmées par son pilote. A Jarama, il commet deux sorties de route durant la seule séance de qualifications et recommencera en course, encore une fois. En France, il réalise une très belle prestation en qualifications mais son rythme de course sera désastreux. Peu avant le dernier quart de course, l’italien gène très largement Prost qui lui prenait un tour, de quoi salir encore un peu plus une réputation déjà peu glorieuse. La pluie qui tombe dru les minutes qui suivent oblige les organisateurs à stopper l’épreuve pour la relancer quelques minutes plus tard. De Cesaris ne fera pas mieux que onzième à l’addition des chronos, loin des performances affichées la veille. Pour la manche à domicile de l’équipe, l'erreur doit être évitée, d’autant plus que les MP4/1 affichent une forme spectaculaire avec la troisième ligne des deux pilotes sur la grille. L’italien est d’ailleurs tenu de bien se comporter, la victoire est plus qu’envisagée sur les terres anglaises. Mais dans le quatrième tour, c’est le drame : Villeneuve perd le contrôle de sa Ferrari, percuté par Jones. Derrière l’écran de fumée et de poussière surgissent les deux McLaren. Watson pile et évite le carnage mais pas l'italien qui vient s’empaler sur la Williams du champion sortant. Dans son malheur, De Cesaris aura réussi une chose : éviter son équipier qui finira par s’imposer. De nouveau auteur d’un tête-à-queue en Allemagne, il ralliera l’arrivée en huitième place en Autriche. Mais à Zandvoort, nouvelle grosse bévue : le romain démolit sa machine dans la courbe de Tarzan en qualifications. Si le mulet est disponible, Dennis se refuse de lui confier. Trop de casse coûte beaucoup d’argent au team anglais. A Monza, nouveau crash durant les essais mais en course, l’italien tient bon chez les siens et vise la sixième place mais dans le dernier tour, une crevaison l’expédie dans le décor. Décidément. Au Canada, rebelote. Alors qu’il vise de nouveau les points sur un circuit noyé, il percute la Brabham de Piquet et cale. Sa saison catastrophe se termine aux USA, à Las Vegas, avec une modeste douzième place sous le drapeau à damier. Tout aurait pu s’arrêter là pour l’italien, titulaire de dix abandons en quinze courses et dix-huit châssis pliés. Mais déjà en 1981, l’argent est roi en Formule 1…

Car en 1982, voilà que de Cesaris réapparaît chez Alfa Romeo. L’italien le sait par avance : la fiabilité sera catastrophique, reste que pour espérer atteindre l’arrivée, il faut également éviter les heurts. Malgré cela et l’arrivée de son surnom “De Crasheris”, l’implication de Marlboro n’aura jamais été aussi forte, les italiennes évoluant sous la même livrée rouge et blanche que les McLaren. L’entame de saison est compliquée mais le romain semble déjà prendre l’ascendant sur son équipier. La nouvelle 182, aussi rapide soit-elle, souffre toujours des mêmes maux mécaniques. Pourtant, c’est bien avec cette monoplace que De Cesaris réalise l’exploit de signer la pole position dans les rues de Long Beach, pulvérisant le record de précocité jusque-là détenu par Jacky Ickx. Personne ne s’attendait à un tel résultat, pas même l’italien qui finira par craquer mais le plus dur reste à faire : gagner la course. Malgré la pression immense sur ses épaules, il caracole un long moment en tête mais au moment de rattraper les premiers attardés, il commence à perdre pied, ce qui profite à Lauda, désormais nouveau leader. Le romain reste dans le sillage de la McLaren mais à mi-course, une erreur d’inattention l’envoi dans le mur. C’est l’abandon. A Imola puis à Zolder, il démontre à nouveau sa bonne pointe de vitesse, jouant même un long moment le podium sur le tracé belge qui venait de connaître la terrible disparition de Gilles Villeneuve, avant de finalement renoncer sur ennui de boite. A Monaco, il évite tous les pièges alors que dans les derniers tours, la pluie s’invite sur la Principauté. Après l’accident du leader Prost, l’italien évolue au troisième rang alors qu’il ne reste que trois tours à boucler. Dans l’avant-dernier, Patrese perd le contrôle de sa Brabham dans l’épingle du Loews, laissant libre champ à Pironi et De Cesaris pour se disputer la victoire mais dans l’ultime boucle, catastrophe : la Ferrari du français s’arrête sous le tunnel en panne d’essence ! L’italien file donc vers un succès inespéré mais patatra, son Alfa se tait quelques mètres avant la Ferrari. S’il est classé troisième et grimpe ainsi sur son premier podium, De Cesaris est extrêmement déçu de rater un succès qui lui tendait les bras, finalement récolté par un Patrese opportuniste. Toujours aussi rapide sur un tour, l’italien n’aura pas plus de chance à Détroit ou à Montréal. Deuxième sur la grille au sein de la ville de Ford, il renonce très rapidement sur bris de biellette de direction. Au Canada, il scelle le troisième rang mais dans l’avant-dernière boucle, son Alfa tombe en panne d’essence, comme à Monaco. Lors des cinq meetings suivants, De Cesaris ne verra jamais le drapeau en damier en dépit de bonnes performances, contrastant avec la sombre épopée de l’année écoulée. Sa réputation le rattrapera finalement en Autriche, accrochant bêtement Daly et son équipier Giacomelli dans les premiers enchaînements. Il lui faudra attendre les trois derniers rendez-vous de l’année pour le voir enfin terminer une course mais loin, trop loin de la seule zone des points. Les espoirs de 1983 sont donc grands pour l’italien qui aimerait tant décrocher un premier succès. L’Alfa Romeo 183T n’est pas la plus belle ni la plus rapide des monoplaces mais le romain la maitrise plutôt bien. Il se fera pourtant remarquer d’une bien belle manière pour la manche d’ouverture au Brésil en refusant tout bonnement de se soumettre à un contrôle des commissaires. La sanction est immédiate : De Cesaris est exclu du week-end de course et ne pourra même pas disputer le grand-prix. L’italien au sang-chaud est prévenu : on ne joue plus avec la FIA. La deuxième manche se dispute à Long Beach, là-même où il décrocha la pole l’année passée mais cette fois-ci, il n’est que dix-neuvième. En France, nouvelle déconvenue pour le romain : les commissaires remarquent que son extincteur de bord est vide, question de poids, au grand étonnement du pilote, non-prévenu de la tricherie. A Spa-Francorchamps, De Cesaris brille à nouveau en prenant la tête dès le départ avant de mener facilement le grand-prix mais un arrêt aux stands trop long et une casse moteur ruineront toutes ses chances de succès. Idem à Silverstone où un problème d’embrayage condamnera son top 5. La délivrance viendra en Allemagne, sur le tracé d'Hockenheim. Qualifié troisième grâce à la puissance monstre de son V8 Turbo italien, il ne manque pas de faire polémique en forçant le passage à des agents de parkings sous prétexte qu’il allait être en retard pour les essais. Remis de ses émotions, il réalise une solide prestation et malgré un joint de culasse défectueux, arrache la deuxième place finale en roues libres ! L’italien explose de joie sur le podium. Il en ferait presque oublier sa mauvaise conduite de la veille… Mais le romain n’en demeure pas moins bouillant. A Zandvoort, alors qu’il évite de justesse le contact avec Patrese en essais libres, le voilà qui ralentit ostensiblement son compatriote dans le seul but de le gêner, avant de lui planter son poing dans la figure une fois rentré aux stands. Ce De Cesaris ne finira pas de nous étonner. A Monza, il s’élance parmi les leaders et peut prétendre à deux gros points mais à l’entame du troisième tour, il pile brusquement pour éviter Tambay et Daly, emboutit la Ferrari avant de s’échouer dans les graviers de la première chicane. Fort heureusement, ses dernières sorties sous les couleurs d’Alfa Romeo seront grandioses. Quatrième pour le grand-prix d’Europe à Brands Hatch, il grimpe la deuxième place en Afrique du Sud, ratant la victoire pour neuf petites secondes derrière son ennemi Patrese. Voilà de gros points qui permettent à l’équipe italienne d’accrocher le sixième rang au classement des constructeurs, leur meilleur résultat, égalisé en 2022. Mais l’argent commence à manquer du côté de Milan. Ainsi, De Cesaris est renvoyé de la structure italienne. Son nouveau refuge ? Les bleus de Ligier.

Problème, l’écurie française est sur la pente descendante si bien qu’en 1983, elle n’a inscrit aucun point. Sans meilleur choix, De Cesaris, toujours soutenu par les cigarettiers, tente tant bien que mal de hisser les bleus à leur niveau de début de décennie. Avec de l’argent frais injecté dans les caisses grâce aux nouveaux commanditaires, tous les espoirs sont permis mais ceux-ci seront vite douchés. Les problèmes de fiabilité sont récurrents, ce qui n’empêche pourtant pas le fougueux italien de se démener pour accrocher un top 6. Ce sera chose faite à Kyalami avec la cinquième place, offrant à Ligier de précieux points après une année compliquée. S’il sort de piste à Zolder, il mène une course sensationnelle à Imola, jouant un long moment le podium avant de tomber en panne d’essence dans l’avant-dernier tour, une fois encore. En France, l’italien est victime de la même mésaventure qu’un an auparavant : son extincteur est vide. Les commissaires sont intransigeants : le romain est exclu des qualifications. Il faudra attendre l’annonce du forfait de son équipier Hesnault pour voir De Cesaris fouler la grille, un forfait voulu par le français selon les dires de Guy Ligier. Cela ne sera pas des plus utiles puisque la machine bleue ne fera pas mieux que dixième sous le drapeau à damiers. A Monaco, il se fait percuter dès le départ par son équipier, bloqué derrière le carambolage des Renault à Sainte Dévote. Cet abandon conduira à trois autres retraits consécutifs, le début des ennuis. Il abandonnera d’ailleurs à Dallas sur accrochage, un pépin qui ne manquera pas de raviver un surnom presque oublié. Sa fin de saison sera tout aussi mauvaise, les casses répétées du moteur Renault n’aidant en rien le développement d’une voiture bien trop capricieuse. L’arrivée d’une version “B” à deux courses du but ne changera rien à la donne. Deux points, le score est maigre. Andrea espère alors rebondir en 1985 avec la nouvelle JS25 : pari manqué. POur l’ouverture de saison au Brésil, il commet une bête erreur en percutant la Ferrari d’Arnoux, détruisant sa suspension et ses chances de marquer des points. Mais son nom réapparaît quelques jours plus tard après l’annonce surprise de la Scuderia sur le limogeage du grenoblois qui pourrait être remplacé par … De Cesaris ! Ce sera finalement Johansson qui sera choisi par les rouges, de quoi énerver encore plus le romain, cantonné au ventre mou avec une machine française peu performante. Il faut dire qu’aucunes améliorations n’est amenée dans le clan tricolore par manque d’argent, surtout depuis le retrait des sponsors principaux. Avec le seul argent de Philip Morris, amené par l’italien, Ligier peine à se maintenir la tête hors de l’eau. Les déconvenues sont donc à éviter, de peur d’alourdir la facture. Malheureusement, De Cesaris en paiera les pots cassés, ou du moins, les voitures cassées. Après un nouveau gros carton à Imola, il retrouve le chemin des points à Monaco, tracé qui lui réussit souvent malgré le nombre important d’opportunités de taper le rail. Au pied du podium, le romain savoure ce résultat tel un succès. Mais ce moment de jubilation ne dura guère longtemps. Après deux abandons sur ennuis mécaniques, il s’accroche avec l’autre Ligier de Laffite dans le premier tour du grand-prix d’Allemagne puis, deux semaines plus tard, commet l’irréparable lors du grand-prix d’Autriche. Alors qu’il perd le contrôle de sa Ligier, l’italien continue d’accélérer dans l’herbe. La JS25 glisse avant de percuter un talus. Quatre tonneaux plus tard, le romain retombe sur ses roues. S’en est trop pour Guy Ligier qui annonce, sur le champ, le renvoi de son pilote pour coût exorbitant des réparations. L’italien sera pourtant présent à Zandvoort car personne n’a été trouvé pour le remplacer mais Ligier l’assure, il n’y sera plus à partir de Monza. Tout penaud, “De Crasheris” sort par la petite porte. Son avenir en F1 s’est plus qu’assombrit mais son porte-monnaie, lui, est toujours bien rempli…

Malheureusement pour lui, il sera désormais cantonné à roder en fond de grille. En 1986, il trouve refuge chez Minardi, écurie toute jeune qui engage enfin deux voitures mais même avec deux bolides, le résultat est catastrophique. Si les saisons écoulées l’étaient, 1986 sera l’une des pires. Sur la totalité des seize courses, il n’en terminera qu’une seule. Le reste du temps, il enchaîne les casses moteur, les bris de transmission, les explosions de turbos,... Il n’a même plus l'occasion de tomber en panne d’essence tant sa monture est mauvaise. Pire, il se fait souvent laminer par son équipier Nannini, même si à eux-deux, ils n’inscriront aucun point. Il n’y a donc qu’au Mexique que l’italien croise la ligne d’arrivée, en huitième position. Pour la dernière à Adélaïde, il comment une nouvelle bourde en actionnant par mégarde son extincteur lors d’un arrêt aux stands ! L’aventure italienne ne décollant pas, le romain décide de prendre un tout autre chemin en rejoignant une cinquième écurie en sept ans : Brabham. Le nom fait rêver mais le team anglais est loin de sa superbe d’antan. Surtout, elle a perdu, en 1986, deux éléments importants : De Angelis, mort en essais privés au Castellet, et Gordon Murray, le père de la BT55. Si 1985 était exceptionnelle avec quinze abandons en seize épreuves, 1987 sera une pépite : De Cesaris ne verra pas une seule fois la ligne d’arrivée de l’année ! Il sera cependant classé à deux reprises, en Belgique et en Australie, tombant en panne d’essence dans le dernier tour. D’ailleurs, à Spa-Francorchamps, il évite tous les pépins pour tenir une troisième place étonnante jusqu’à ce que le moteur se taise juste avant d’entamer la dernière boucle. L’italien ne se décourage pas et tente de pousser sa monoplace jusqu’à la ligne. S’il n’y arrive pas, ses adversaires l’ont déjà fait, synonyme de classement inchangé. Pour la première fois depuis quatre ans, De Cesaris retrouve le chemin du podium, un bien beau résultat pour quelqu’un qui ne termine pas souvent ses grands-prix. Mais le reste du temps, impossible de se battre pour quoi que ce soit. Le moteur BMW est poussif et casse comme du verre. Andrea détruit certe moins de voitures, il n’empêche que son nombre d'abandons devient colossal et pourtant, rien ne l’arrête. L’année suivante, nouveau changement. Le romain n’a d’autre choix que de quitter un vaisseau Brabham disparu pour rejoindre la petite équipe Rial et son unique monoplace. Malgré un nouveau cadre de travail, le résultat ne change pas : cinq retraits en cinq courses, le malheureux est définitivement maudit. Depuis le grand-prix de France 1985, disputé avec Ligier, il n’a croisé qu’une seule fois le drapeau à damier en quarante-et-une participations ! Officiellement, l’italien est affublé du triste record de vingt-deux abandons consécutifs, lui qui détenait déjà ce titre avec douze retraits consécutifs en 1982. D'ailleurs, encore aujourd'hui, De Cesaris occupe deux des trois premières places de ce classement peu flatteur. Mais à Détroit, révolution. Le romain pousse sa modeste Rial au quatrième rang final, un exploit pour la petite structure. Mais De Cesaris ne serait pas aussi iconique sans ses coups de sang impromptus. Le soir du grand-prix, l’italien manque son vol et se précipite pour en accrocher un suivant, ce qui lui vaudra d’en venir aux mains avec un policier sur place. De Cesaris passera la nuit au poste avant de ressortir le lendemain… Sacré Andrea. La belle performance de Detroit ne sera finalement jamais rééditée, la fiabilité et le manque de développement plombant la saison du fougueux romain. Une fois n’est pas coutume, c’est chez la Scuderia Italia, avec une voiture Dallara, que vogue le pilote italien pour 1989, sans grands espoirs. Il devient pourtant l’un des pilotes les plus capés en grand-prix mais avec une pole, pas de victoires et un seul meilleur tour, difficile de comprendre ce qui peut le retenir en catégorie reine. Ah, l’argent peut-être… En cette année 1989, De Cesaris à de quoi être optimiste : la fiabilité est enfin au rendez-vous ! Ne manque plus que la performance. Coincé dans le ventre mou du peloton, il tentera de ramarrer le top 6, sans succès, jusqu’à ce fameux grand-prix canadien. A la surprise générale, De Cesaris grimpe sur la troisième marche du podium, le premier pour Dallara, mais aussi le dernier pour l’italien. Peu à peu, la monoplace rouge et blanche s’enfonce dans le classement. S’il reste en 1990, c’est pour mieux couler. Pas de points, des casses à gogo, des erreurs de pilotage, bref, un nouveau désastre. Après avoir vécu autant de contre-performances et d’échecs, beaucoup arrêteraient le massacre. Beaucoup, mais pas Andrea De Cesaris…

C’est pour cela qu’en 1991, l’italien embarque pour sa douzième saison avec le nouveau team Jordan et ses magnifiques 191 vertes et bleues. Mais la première course de l’année lui réserve une bien mauvaise surprise. Victime d’une casse moteur lors des pré-qualifications, le romain ne pourra même pas tenter sa chance sur un tour chrono, une bien mauvaise entrée en matière. Par chance, la Jordan est performante mais manque encore de fiabilité et de mise au point. Les premiers meetings ne seront pas couronnés de succès mais après un magnifique grand-prix au Canada, il récolte enfin les trois points de la quatrième place. Il réédite cette performance au Mexique, bien qu’en panne d’essence à quelques mètres de la ligne d’arrivée. Avec son incontournable fougue, De Cesaris sort de sa monoplace et la pousse jusqu’à la ligne, sous l'œil avisé d’un journaliste italien prêt à l’interviewer en direct sur la piste ! Disqualifié dans un premier temps pour cette manœuvre, il réintègre, quelques heures plus tard, le classement car finalement, le pilote est autorisé à pousser sa voiture si le drapeau à damier est agité. Alors que les points affluent dans son compteur, il est victime d’un spectaculaire accident à Silverstone, heureusement sans conséquences physiques. A Spa-Francorchamps, l’affaire judiciaire qui touche son équipier Gachot oblige l’écurie irlandaise à trouver un nouvel équipier à l’italien, un certain Michael Schumacher. Battu d’entrée de jeu en qualifications, de Cesaris mène pourtant ce qui s’apparente à la plus belle course de sa carrière. Bénéficiant des problèmes des leaders, il caracole un long moment au deuxième rang, revenant même dans les roues de Senna, alors premier. Le rêve de victoire devient alors une possibilité mais à deux tours du but, son moteur explose. La frustration et la tristesse sont immenses pour l’italien et son équipe qui passent tous deux très proches de l’exploit. Et si Schumacher n’avait pas eu son problème au départ, peut-être aurait-il pu s’imposer lui aussi… La fin de saison se terminera trop souvent à la porte des points mais peu importe, cette première campagne avec Jordan aura été fructueuse. Évidemment, De Cesaris choisira une autre option pour 1992 et 1993 : Tyrrell. Les voitures anglaises naviguent dans le fond de classement depuis une dizaine d’années et n’en sortiront plus. Si 1992 se conclut avec deux cinquièmes et une quatrième places comme meilleurs résultats, l’année suivante sera une déroute totale : pas de points, beaucoup d’abandons, des contre-performances qui s’accumulent, bref, une fin de carrière promise en somme. Pourtant, l’italien continue de chercher un volant pour 1994 et malgré ses liens toujours aussi étroits avec Philip Morris, De Cesaris ne sera pas sur la grille de départ. Enfin, pas directement. A Imola, pour le plus tragique des week-ends de course, il rejoint Jordan en remplacement d’Irvine, suspendu après le carambolage du grand-prix brésilien. Il terminera sur un nouvel accident, heureusement sans conséquences pour lui. A Monaco, il réalise une belle course en se classant quatrième mais son aventure doit déjà prendre fin, du moins chez Jordan. Car dans les rues de la principauté, Wendlinger est victime d’une dramatique sortie de piste à plus de 280 km/h. Sans pilote, Peter Sauber fait appel à l’éternel Andrea pour pallier à l'absence de son grand autrichien. Sixième en France, il enchainera sept abandons consécutifs jusqu’au retour du vrai titulaire. Pensant que tout était terminé pour lui, il s’en alla de l’autre côté du globe, profiter du soleil et des plages de sable blanc, là où personne ne pourrait le déranger, pas même Sauber qui cherchait désespérement à le joindre pour l’engager en 1995…

Après 208 départs, l’italien raccroche le casque. Il ne le ressortira que pour participer, en 2005 et 2006, à trois manches des GP Masters, sans succès. De Cesaris restera un personnage à part entière dans le monde de la Formule 1,autant par son caractère bien trempé que par son coup de volant et sa malchance incroyable. D’ailleurs, il est, avec Patrese, le pilote ayant le plus abandonné en carrière avec 147, soit plus de 70% du temps ! Il faut dire que “De Crasheris” aura usé beaucoup de châssis et de composants mais il avait fini par s’assagir, ne souffrant bien plus de la fiabilité que de ses propres erreurs. Une pole, un meilleur tour et cinq podiums, un bien maigre bilan pour celui qui aura connu une longévité exceptionnelle et pas moins de dix écuries différentes ! Malheureusement, le romain finira par trouver la mort en moto dans un accident de la circulation en 2014. Celui qui se sera sorti à de multiples reprises à 300 km/h n’aura pas eu cette chance du survivant qui le collait tant en Formule 1…

Andrea De Cesaris en chiffres...

Meilleur classement en championnat du monde F1 :

8e (1983)

Grands-prix :

208 (214 engagements)

Victoires :

0

Podiums :

5

Poles Position :

1

Meilleurs Tours :

1

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