Mario Andretti
Difficile de désigner le plus grand pilote de l'histoire toutes catégories confondues. Pourtant, il en est un qui aura presque tout gagné partout où il est allé : le grand Mario Andretti.
Né italien, Mario Andretti, et son frère jumeau Aldo, partagent la même passion tout jeune : la course automobile. Enfants, ils passent beaucoup de temps à jouer ensemble et à bricoler des voitures en bois, assistants également à plusieurs grandes courses locales, notamment le grand-prix d’Italie ou encore les Mille Miglia. Mais en 1955, toute la famille Andretti change de continent et émigre vers les Etats-Unis. Ce changement d’atmosphère ne dérange en rien les frangins qui, quatre ans plus tard, font l’acquisition d’une Hudson qu’ils préparent pour les courses de stock-car. Bien que leurs parents ne soient pas au courant, Aldo et Mario enchaînent les victoires sur ces ovales de terre mais alors que la fratrie Andretti survole les débats, Aldo est victime d’un gros accident, mettant fin prématurément à une possible carrière promise. Très mécontents du comportement de leurs enfants, les parents ont du mal à accepter ce vers quoi s’orientent leurs fils, notamment Mario. Rapidement, son niveau de pilotage ne passe plus inaperçu et en 1961, il intègre le championnat de Midget, non sans avoir écrasé de son empreinte les différentes épreuves de Stock Car avec pas moins de vingt-et-un succès en moins de deux ans. La machine Andretti était lancée. Trois saisons et trois victoires plus tard, le désormais naturalisé américain évolue et se voit présenter diverses options pour la suite de sa carrière. Dans le cadre du “United States Auto Club”, aussi appelé USAC, le jeune Mario peut enfin courir là où il l’a toujours souhaité : la monoplace. Que ce soit sur des pistes ovales en terre, bitumées ou sur circuits routiers, le jeune Mario s’acclimate très vite à ces nouvelles machines. Dès sa première année, même s’il ne dispute pas toutes les manches, il se classe en tant que meilleur rookie, récoltant même la troisième place finale à Milwaukee. Et ce n’était qu’un début…
A partir de 1965, l’américain commence à terroriser le monde entier. Lors de ses premiers 500 Miles d’Indianapolis, Mario fait la connaissance du patron et fondateur de Lotus, Colin Chapman, venu spécialement pour voir évoluer son prodige Jim Clark, futur vainqueur de l’épreuve. De cette rencontre découlera une belle amitié mais surtout le début d’une grande épopée avec la marque anglaise à la fin des années 60 et 70. Troisième de l’Indy 500 mais meilleur rookie, Andretti accumule les coupes et les podiums si bien qu’à la fin de la saison, les A.J.Foyt ou Bobby Unser sont battus. Déjà champion de la discipline, le nouveau roi des circuits américains n’entend pas s’arrêter là. Dès 1966, il tente l’aventure NASCAR avec quelques piges mais sans grande réussite, tout comme lors des 24 Heures de Daytona ou des 12 Heures de Sebring, ses premières vraies courses d’endurance. Mais si ses Chevrolet, Ford, Dodge ou Ferrari ne lui offrent pas les succès escomptés, ses adversaires ne peuvent que constater sa supériorité en USAC, l’ancêtre de l’Indycar, le champion sortant doublant la mise cette année-là avec huit victoires au compteur. 1967 verra le débarquement de Mario sur le Vieux Continent, notamment lors de la classique mancelle des 24 Heures du Mans. Sur la Ford GT40 n°6 partagée avec Lucien Bianchi, Andretti ne connaît pas le même succès que ses compères de la marque à l’ovale bleu. Pourtant, quelques mois plus tôt, le géant automobile lui donnait la voiture pour la gagne lors du Daytona 500, la plus grande épreuve de NASCAR de l’année. Jamais il ne retrouvera la Victory Lane dans cette drôle de catégorie. Ce triomphe totalement inattendu face aux pointures Richard Petty, Bobby Allison ou Cale Yarborough est suivi, quelques semaines plus tard, par une nouvelle victoire notable lors des 12 Heures de Sebring, accompagné par Bruce McLaren. Huit nouvelles premières places sont à ajouter à son palmarès en 1967, toutes acquises en USAC. Cependant, ce gros ratio de succès ne sera pas suffisant pour garder son dû, le redoutable A.J.Foyt le devançant d’un rien à l’issue du championnat et ce, malgré sa seconde pole position consécutive lors des 500 Miles d’Indianapolis. De nouveau très rapide en 1968, il renoncera après seulement deux boucles, la mécanique ruinant ses chances de bien figurer. Cet abandon lui coûtera sûrement une troisième couronne car tout au long de la saison, le duel acharné face à Bobby Unser laisse entrevoir un probable troisième sacre, le tout, en dirigeant sa propre structure, le “Andretti Racing Team”. Finalement, Andretti échoue à seulement onze petits points de son adversaire après la manche de Phoenix, un écart ridicule. Mais dans le même temps, le grand Mario décide de passer un cap, se sentant sans doute prêt à affronter certains des tous meilleurs sur les plus grands circuits du monde. Il appela donc Chapman, ce dernier lui ayant promis un volant en Formule 1 dès que l’américain le désirait. C’est chose faite à Monza, sur ses terres natales mais déjà, un premier hic apparaît. Après les premiers essais, Mario, accompagné par Unser, lui aussi débutant chez BRM, s’envole vers les Etats-Unis la veille de la course pour courir en sprint-car. Or, le règlement Formule 1 n’autorise pas la participation à une épreuve 24 heures avant le départ du grand-prix. Les deux hommes sont donc obligés de suivre la manche italienne depuis les stands, pour le plus grand désarroi de Chapman et d’Andretti....
Les débuts officiels d’Andretti en Formule 1 sont donc reportés à son autre grand-prix national, celui des Etats-Unis à Watkins Glen. Et dès le début, l’américain impressionne. Sur une 49B parfaitement réglée, Mario s’offre d’emblée la pole position, un exploit réalisé à seulement six reprises depuis 1950. Bien que débordé par Stewart au départ, il parvient à tenir la deuxième place quand son embrayage commence à montrer quelques signes de faiblesse. L’abandon est inévitable. En 1969, l’USAC prime encore sur la Formule 1 et pour cause, le natif italien domine comme jamais. Malgré un contrat à plein temps proposé par Chapman, Andretti décide de privilégier le championnat américain, sans pour autant exclure la catégorie reine. Avec neuf victoires en vingt-quatre courses, sa troisième couronne s’offre à lui avec comme point d’orgue, une magnifique victoire aux 500 Miles d’Indianapolis, loin, très loin devant le second Gurney. Cette même année, l’américain réalise une très belle performance hors des sentiers battus en s’imposant lors de la très difficile et réputée course de côte de Pikes Peak. A l’aise sur ovale, à l’aise sur les chemins escarpés, à l’aise en endurance, que lui reste-t-il à démontrer ? La réponse est simple : battre certains des meilleurs hommes dans les machines les plus rapides du monde. Sa place serait toute trouvée en 1970 chez Lotus mais avec une 49B en fin de carrière et une 63 mal née, les bons résultats sont difficiles à atteindre. Malgré cela, Andretti songe à amplifier sa présence en Europe et s’engage avec la nouvelle écurie March, tout comme un certain Jackie Stewart, champion en titre. Sa monoplace ornée des logos STP est bien née et dès sa deuxième sortie, la voici déjà victorieuse grâce à l’écossais. Quant à Andretti, c’est en troisième position qu’il achève ce grand-prix d’Espagne, son premier podium en F1. La suite de la saison sera bien moins bonne, tout comme aux Etats-Unis où une seule victoire toute catégorie confondue s’ajoute à son palmarès. La motivation est toujours bien présente mais l’envie d’en découdre est plus forte que tout. Le virage entrepris en 1971 se doit d’être gagnant et c’est avec Ferrari que l’américain se lie pour ce gros pari. Toujours bien occupé par le championnat de monoplace américain, Mario découvre, dans le même temps, les joies de la machine rouge et blanche et son Flat-12 mélodieux. Pour sa première course à Kyalami, le voilà sur les talons du leader Hulme à quelques boucles du but quand tout-à-coup, la suspension arrière de la McLaren s'affaisse. Le pilote Ferrari profite immédiatement de cette opportunité et franchit la ligne d’arrivée en vainqueur, son premier succès en Formule 1 alors qu’il ne pilote pas à plein temps ! Il doublera la mise hors-championnat avec le Questor Grand-Prix mais dès lors, les week-ends se suivent et ne se ressemblent pas. Pour son premier Monaco, il ne parvient même pas à se qualifier, la faute à une pompe à essence récalcitrante et une pluie un peu trop omniprésente. Le restant de sa saison ne sera pas des plus grandioses et que ce soit en Europe ou en Amérique, la première place ne sera jamais sienne. Il faudra attendre 1972 pour le retrouver sur la plus haute marche du podium, notamment en endurance, avec quatre victoires de prestige à Daytona, Sebring, Brands Hatch et Watkins Glen, toujours associé à l’iconique Jacky Ickx et la splendide Ferrari 312 PB. Mais du côté de la Formule 1, sa 312 B2 pourtant très véloce ne fait pas le poids face aux Tyrrell et Lotus. Son aventure avec les rouges prend logiquement fin à l’issue de cette année-là. Pas plus de lauriers en monoplace américaine malgré d'innombrables changements d’équipe et de personnel. Décision est donc prise de sacrifier l’un des deux championnats pour se concentrer uniquement sur le plus important. Et c’est vers les Etats-Unis que se penche Andretti mais là encore, le niveau de la concurrence est élevé et avec une seule victoire, il ne s’adjuge que la cinquième place au classement final du championnat sur bitume en 1973. De plus, Mario, toujours en quête de nouvelles challenges, s’engage en Formule 5000 nord-américain, discipline dans laquelle il terminera second en 1973 mais aussi en 1974.
D’ailleurs, cette année 1974 voit Andretti rejoindre l’équipe Parnelli, écurie fondée par le pilote américain Parnelli Jones. Malgré une pole position sur le Trenton International Speedway, l’américain ne retourne pas sur la Victory Lane. Mais dans l’ombre du championnat USAC, le vainqueur de l’Indy 500 1969 prépare activement son retour en Formule 1, toujours avec Parnelli. En effet, l’ex-pilote directeur d’écurie s’initie à la catégorie reine, développant sa propre monoplace, uniquement confiée à Andretti. La première apparition de la monture rouge et blanche s’effectue au Canada et le moins que l’on puisse dire, c’est que les débuts ne sont pas si mauvais. Parti seizième, le triple champion USAC remonte jusqu’à la porte des points, en septième position. Pour la dernière de l’année à Watkins Glen, la Parnelli se hisse au troisième rang sur la grille mais le lendemain, son système d’injection tombe en panne avant même le départ. Changé en hâte, il n’affectera en rien les résultats, les commissaires disqualifiant l’américain pour modification illégale. Ces performances concluantes poussent alors Andretti à s’engager pour une saison presque complète avec Parnelli en 1975. Après une entame de saison en demi-teinte avec notamment un bris de suspension alors qu’il menait en Espagne, les choses évoluent à partir du grand-prix de Suède. Qualifié lointain quinzième, il profite d’une voiture bien équilibrée pour terminer quatrième, offrant à sa petite équipe ses premiers points en catégorie reine. Il récidivera un mois plus tard au Castellet, achevant sa course une place plus bas dans le classement. Cependant, sa fin de campagne sera des plus compliquée et le manque d’argent pèse dans le développement de la voiture. Après seulement deux rendez-vous en 1976, Parnelli cesse ses activités en Formule 1, au grand dam d’Andretti. Mais pour l’américain, rien n’est perdu. Une solution existe encore et elle s’appelle Lotus. C’est donc dans l’écurie de Colin Chapman que le grand Mario fait son retour, sans illusions cette fois-ci. La 77 est loin de ses rivales de chez McLaren ou Ferrari mais tout espoir est permis. D’autant plus que, dans le plus grand secret, Lotus développe un nouveau concept innovant prévu pour 1977. Si la monture noire et or n’est pas la plus rapide, Andretti sait comment la régler pour en tirer le maximum. Ainsi, il décrochera la deuxième place sur la grille en Suède avant de prendre le commandement de l’épreuve par le biais d’un départ volé. Retrouvant les points en France, il monte sur son premier podium en cinq ans sur le tracé de Zandvoort. De nouveau troisième au Canada, il termine la saison en beauté lors de l’incroyable grand-prix du Japon à Fuji. Après s’être octroyé la pole position avec panache, il évite toutes les embûches de la météo pour s’adjuger un second succès en Formule 1 au terme d’une course épique. Fort d’une victoire bien méritée, Andretti sait que son heure peut venir l’année suivante, lui qui désormais se consacre presque uniquement à la catégorie reine. La raison ? La nouvelle Lotus 78 et son inédit effet de sol. Travaillant d’arrache-pied sur cette monoplace durant la saison 1976, l’américain connaît d’ores et déjà le potentiel de la bête mais la concurrence reste rude. Star de la première manche en Argentine, la 78 ne voit pas les débuts espérés par son équipe. Pire, c’est l’écurie débutante Wolf qui mène la danse avec le sud-africain Scheckter, pour le plus grand étonnement de Ferrari, McLaren et bien sûr Lotus. Mais Chapman à foi en sa nouvelle création et sait que tôt ou tard, les résultats arriveront. La délivrance arrivera sur le tracé urbain de Long Beach. Longtemps bloqué derrière le sud-africain, Andretti saisit sa chance à quelques tours du but pour s’imposer, remportant au passage le premier succès d’une voiture à effet de sol, qui plus est, dans son pays d’adoption. Sur sa lancée, l’américain accroche une deuxième victoire en Espagne avant de prendre la pole en Belgique, en Suède, puis en France. Cependant, la monoplace noire et or n’est pas la plus fiable. Après un bête accrochage en Belgique, Mario Andretti retrouve la plus haute marche du podium sur le circuit de Dijon-Prenois dans le tout dernier tour de course, mais par la suite, les choses se compliquent. Peu fiable, la 78 prive ses pilotes de nombreuses belles opportunités de bien figurer, notamment pour l’américain, victime de quatre casses moteur en deuxième partie de saison. Malgré un nouveau triomphe à Monza, la lutte pour le championnat tourne au duel entre Lauda et Scheckter. Mais comme en 1976, en coulisses, on s’active chez Lotus. Le concept de la voiture à effet de sol est plus qu’efficace mais les nombreux problèmes de fiabilité coûtent de trop nombreux points à l’écurie anglaise. Chapman planche donc sur une évolution de sa 78 encore plus redoutable : la fameuse Lotus 79.
Mais pour le début de saison 1978, la nouvelle bête n’est pas encore prête, poussant la 78 à reprendre du service. Et il faut dire que la monture noire et or n’a pas perdu de ses performances durant l’hiver, Andretti dominant de la tête et des épaules le premier rendez-vous en Argentine. Mais lors des quatre meetings suivants, la concurrence refait surface, d’autant plus qu’avec deux podiums en cinq grands-prix, les rêves de couronne mondiale semblent quelque peu altérés. Ce n’est qu’à Zolder que la roue tourne enfin en faveur de l’américain. Avec la toute nouvelle 79, Chapman espère écraser la discipline et faire de son poulain le prochain champion du monde. Pour avancer cela, il compte notamment sur les résultats plus que probants de sa nouvelle création en piste et en soufflerie, menés en grande partie par Andretti. Le talent de mise au point de l’américain sera plus que bénéfique pour l’écurie anglaise en cette saison 1978. Pour sa première sortie officielle, la 79 colle presque huit dixièmes à toutes les autres monoplaces et en course, personne ne pourra jamais l’inquiéter. A Jarama, la sanction est la même pour toutes les autres voitures : pole, meilleur tour, et victoire du grand Mario, de nouveau devant son équipier Peterson, fraîchement doté de la Lotus révolutionnaire. Mais en Suède, grande nouveauté : Brabham présente sa BT46B et son étonnant ventilateur arrière. Dès lors, Chapman prend peur devant cette machine si spéciale. Pourtant, c’est bien son pilote n°1 qui réalise la pole, bien aidé par le ralentissement volontaire des deux Brabham. Le lendemain, la machine rouge de Lauda vole littéralement et même si Andretti se voit contraint de renoncer sur souci moteur, il n’aurait pas pu empêcher le triomphe de l’autrichien. Mais rapidement, de nombreuses voix s’élèvent contre cette monoplace jugée illégale par beaucoup. Elle finira par ne plus être autorisée au départ d’un grand-prix, pour le grand soulagement d’un Chapman particulièrement inquiet de ses performances. A partir de ce moment-là, les Lotus évoluent seules au monde. Vainqueur en France, puis en Allemagne et aux Pays-Bas, l’américain doit faire face à un seul et unique adversaire : son équipier Peterson. Bien qu’ayant le statut de numéro deux, le suédois profite bien des pépins mécaniques auxquels est confronté Andretti à Brands Hatch ou sur l’Österreichring. Mais le fruit du travail des deux hommes s’avère plus que payant. En quittant Zandvoort, Chapman voit son écurie auréolée d’une septième étoile. Ne reste plus qu’à décerner le titre de champion pilote. En arrivant à Monza, les équipiers Lotus sont séparés par douze petits points, à l’avantage de Mario, mais le destin en décidera autrement. Sur le très rapide tracé italien, le départ est souvent critique. 1978 n’y fit pas exception. Au milieu du paquet, les voitures s'accrochent et se percutent. Le malheureux Peterson est pris dans cet incident ; il en sortira fortement injurié. L’épreuve est bien entendu arrêtée mais un second départ est donné quelques instants plus tard. Pour éviter la cohue du premier virage, Andretti et Villeneuve n’hésitent pas à s’élancer avant le signal pour éviter tout grabuge. Cela leur vaudra une minute de pénalité à l’arrivée et malgré sa bonne course face à Villeneuve et son passage en premier sous le drapeau à damier, l’américain n’est classé que sixième. Mais plus que la pénalité, c’est l’accident du départ qui fait parler. Dans un état grave, Peterson ne pourra sans doute pas reprendre le volant pour se battre pour la couronne, faisant d’Andretti le probable champion 1978. Mais c’est le lendemain que tout bascule : opéré en hâte à Milan, le suédois ne survivra pas à une embolie subite. Cette nouvelle choque le monde de la Formule 1 et surtout Mario et Chapman. Cette fois c’est sûr, l’américain est bien champion mais le cœur n’y est clairement pas. Cette tragédie finira par le suivre tout le long de sa carrière. Certes, le titre est scellé entre ses mains mais jamais Mario n’avait souhaité l’emporter de cette façon. Si la pole lui revient pour l’avant-dernière manche de la saison à Watkins Glen, il n'inscrit finalement aucun point supplémentaire. Une fois la campagne 1978 terminée, l’écurie Lotus s’attend à un retour de la concurrence avec le développement des nouvelles voitures à effet de sol. La 79 reste tout d’abord de la partie mais rapidement, c’est la Ferrari 312 T4 qui sort son épingle du jeu. Après la sortie ratée de la 80, ne couvrant que trois courses, l’équipe anglaise ressort sa 79 désormais dépassée. Sur les dix derniers rendez-vous de 1979, Andretti renonce à neuf reprises, ne finissant dans le top trois qu’une seule fois, à Jarama. Ce sera même pire en 1980. Avec une Lotus 81 des plus médiocre, l’américain n'inscrit qu’un seul petit point lors du tout dernier meeting, à Las Vegas. Dans une écurie incapable de se battre pour les avant-postes, le champion 1978 décide alors de retourner en Italie, non pas chez Ferrari, mais chez Alfa Romeo. Hélas, le choix n’est pas le plus judicieux. Quatrième d’emblée à Long Beach, il ne retrouvera jamais le chemin des points. Cette fois, c’est la saison de trop. L’américain se retire tout bonnement de la Formule 1 sans pour autant annoncer sa retraite sportive et pour cause, à quarante-et-un ans, le grand Mario estime qu’il a encore beaucoup de choses à prouver, notamment aux Etats-Unis. Il y fait d’ailleurs une apparition très remarquée lors des 500 Miles d’Indianapolis, achevant la classique américaine en seconde place avant de récupérer la victoire sur tapis vert, avant que le classement ne soit finalement rétabli quelques mois plus tard, en faveur de Bobby Unser.
Champion de Formule 1, vainqueur des 500 Miles d’Indianapolis et de l’USAC, roi du Daytona 500, lauréat des 24 Heures de Daytona et des 12 Heures de Sebring, que lui reste-t-il à démontrer ? Le Mans peut-être. Pour celui qui lime le bitume des circuits du monde entier depuis près de vingt ans, pas question de s’arrêter en si bon chemin. Dès 1982, le CART, nouveau nom du championnat USAC, redevient sa grande priorité. Sans problèmes, Mario Andretti retrouve un volant dans une série plus que populaire aux Etats-Unis, mais surtout, une série qui voit courir son fils Michael. Le retour en 1982 n’est pas évident mais même sans accrocher de victoires, l’américain se place troisième au championnat. Mais dans le même temps, la Formule 1 rappelle son champion 1978. Tout d’abord, c’est Williams qui s’empare des services de l'américain pour la manche de Long Beach pour remplacer un Carlos Reutemann ayant claqué la porte de l’écurie de Didcot. Peu à l’aise entre les murs avec sa FW07C, il abandonnera dans l’anonymat le plus total. Quelques mois plus tard, rebelote. Ce dernier est contacté par Enzo Ferrari pour compléter une équipe meurtrie. Après le décès tragique de Villeneuve et le terrifiant accident de Pironi, la Scuderia cherche un pilote de choix pour épauler Tambay et ainsi accrocher un inattendu titre des constructeurs. Il parviendra à décrocher une ultime pole à Monza, complétée le lendemain par un dernier podium en catégorie reine avec la troisième place. Les gros points récoltés par les deux 126 C2 seront bien utiles puisqu’à Las Vegas, alors que le champion 1978 est le seul représentant rouge sur la grille de départ, le championnat est scellé pour les italiens. Même s’il abandonne, la Formule 1 est bel-et bien derrière lui. S’il y a une chose que Mario Andretti recherche après tout, c’est étoffer encore un peu plus son déjà bien rempli palmarès. Si le CART reste son objectif principal, les 24 Heures du Mans l’intéressent toujours autant. En 1983, il retente l’aventure en Sarthe avec son fils et Philippe Alliot, l’équipage terminant troisième de la course. Avant son retour en France en 1988, Mario Andretti se rappelle au bon souvenir de tous lorsqu’en 1984, il remporte pour la quatrième fois le championnat de monoplace américain avec six victoires au compteur. En 1985, il passe tout proche de réaliser le doublé à Indianapolis mais suite à un duel mémorable avec Denny Sullivan, il s’incline pour terminer à nouveau second. L’année suivante, lors de la manche de Portland, son fils domine la course, juste devant lui. Mais dans la dernière accélération vers la ligne d’arrivée, c’est la panne d’essence et sous le drapeau à damier, c’est Mario qui passe en tête, juste devant Michael. Jusqu’en 1994, le champion 1978 risqua sa vie sur les ovales et autres grands tracés américains, sans pour autant décrocher de nouvelles couronnes. Il sera même associé à Michael à partir de 1989 chez Newman / Haas Racing, avant de voir sa progéniture rejoindre la Formule 1 chez McLaren pour un résultat relativement décevant, n’amassant qu’un seul podium en treize grands-prix aux côtés de Senna. Ces mêmes Andretti père et fils seront rejoints par le neveu John lors des 24 Heures du Mans 1988 sur une Porsche 962C, les voyant alors terminer sixième de la classique mancelle. A cinquante-quatre ans, le grand Mario annonce sa retraite de pilote à plein temps mais même si sa grande carrière est derrière lui, Andretti ne songe pas à arrêter le pilotage pour autant et en 1995, le revoici au départ des 24 Heures du Mans. Sa dernière tentative en 1988 ne fut pas vraiment couronnée de succès. Sept ans plus tard, c’est sur un prototype Courage que l’américain cherche à s’imposer en Sarthe. Jamais il ne sera passé aussi près de son souhait, échouant en seconde place, un tour derrière l’étonnante McLaren F1-GTR. Après deux autres essais en 1996 et 1997, Mario décide de raccrocher définitivement, enfin presque. En 2000, le team officiel Panoz contacte le grand champion américain pour les 24 Heures du Mans. A soixante ans, Mario se lance dans cet ultime défi au volant de l’une de ses voitures les plus monstrueuses. Malgré quelques petits pépins, la Batmobile rouge croise l’arrivée en quinzième place au général, la dernière arrivée pour Andretti.
Après plus de quarante ans de carrière en sport automobile, Mario Andretti tire sa révérence, du moins, c’est ce que l’on pensait. En 2003, le revoici au volant d’une voiture d’Indycar lors des essais des 500 Miles d’Indianapolis. Alors qu’il envisageait de prendre à nouveau le départ, il est victime d’un effroyable accident, fort heureusement sans dommages. Les images de son envolée sur plusieurs centaines de mètres font évidemment froid dans le dos. Andretti le comprend, le risque n’en vaut plus la peine. L’un des plus grands pilotes de tous les temps venait de raccrocher son casque, définitivement. Avec douze victoires en Formule 1, cinquante-deux en monoplace américaine, le Daytona 500, les 500 Miles d’Indianapolis, le championnat du monde de Formule 1, celui d’USAC/CART à quatre reprises, Sebring, Daytona ou encore la course de côte de Pikes Peak, son palmarès est sûrement le plus complet de tous les pilotes à ce jour. D’ailleurs, l’américain aura reçu, de la part de plusieurs grands magazines spécialisés, la distinction de meilleur pilote du vingtième siècle, voire même de meilleur pilote de tous les temps, un qualificatif que le grand Mario n’aura sûrement pas volé. C’est d’ailleurs, à ce jour, le seul à avoir remporté au moins une épreuve sur quatre décennies consécutives, preuve d’une longévité exceptionnelle. Même s’il se fait plus discret aujourd’hui, Mario Andretti reste un personnage iconique des sports motorisés, portant toujours fièrement son nom en Indycar en tant qu’équipe tout en prenant très souvent le volant de la biplace juste avant l’agitation du drapeau vert. Les récentes sorties de son petit-fils Marco et les ambitieux projets de son fils Michael n’ont fait que faire résonner encore un peu plus ce nom synonyme de légende.
Mario Andretti en chiffres....
Meilleur classement en championnat du monde F1 :
Champion du monde (1978)
Grands-prix :
128 (141 engagements)
Victoires :
12
Podiums :
19
Poles Position :
18
Meilleurs Tours :
10







