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Wolfgang Von Trips

L’Allemagne et la Formule 1, une histoire de champion qui aurait dû commencer par le sacre d’un homme : Wolfgang Von Trips.

Né le 4 Mai 1928 en Rhénanie du Nord, Wolfgang von Trips s’est très rapidement pris de passion pour la vitesse. Issu d’une famille noble, il n’a aucun problème à s’initier à sa grande passion mais du côté de ses parents, l’idée de courir à vive allure reste bien trop dangereuse. Durant son enfance, le jeune allemand est touché par plusieurs problèmes de santé, le rendant même inapte pour le service militaire. Ces quelques pépins ne l'empêchent cependant pas de s’adonner au plaisir de la conduite et au début des années 50, le voici évoluant aux guidons de moto. Les premiers résultats sont loin d’être convaincants et les accidents se multiplient. Sa première année le verra même lourdement chuter et se casser le bras. Jamais rassasié, il retrouve très vite la compétition mais sous un pseudonyme, Axel Linther en l'occurrence, pour que sa mère ne soit pas au courant de ses activités. Petit à petit, ses performances s’améliorent si bien qu’en 1954, il participe à sa première grande épreuve : les Mille Miglia. Sur sa Porsche 356, et accompagné de Hampel, il termine trente-troisième de la classique italienne et deuxième de sa catégorie, une belle prestation pour un débutant. Ses trois autres courses sur le sol allemand se solderont toutes par des top 5 en catégorie, de quoi augurer de très bonnes choses pour son avenir en sport automobile. 1955 sera de la même trempe que l’année écoulée avec de nombreuses participations en championnat du monde de voitures de sport, que ce soit sur des Porsche ou bien des Mercedes. Une troisième place décrochée lors de l’International Tourist Trophy restera son meilleur résultat. Ses premières luttes face à de gros calibres tels que Moss, Fangio, Musso ou Taruffi ne font que faire monter sa côte de popularité auprès des grandes équipes. Son chemin à haut niveau semble désormais tout tracé et il apparaît bien vite que 1956 sera l’année de son éclosion au plus au de la hiérarchie du sport automobile de l’époque : la Formule 1. Enfin presque. Von Trips gagne de plus en plus l’estime des constructeurs et en cette nouvelle saison, les épreuves mythiques se succèdent : 12 Heures de Sebring, Mille Miglia, 1000km du Nürburgring ou encore 24 Heures du Mans. Un certain Enzo Ferrari viendra même lui confier le volant de ses bolides rouges. Suite à sa deuxième place lors des 6 Heures de Råbelövsbanan sous les couleurs de la Scuderia, le Commendatore décide de l’inclure au sein de sa déjà mythique écurie de course. Le petit prodige allemand, du haut de ses vingt-quatre ans, allait enfin découvrir le monde de la Formule 1, deux ans à peine après ses débuts en compétition professionnelle, un rêve devenu réalité.

Mais cette première expérience en Formule 1 fut tout sauf réussie. Invité à Monza pour conduire la D50 n°50, il ne franchira pas le cap des essais, se blessant au bras lors d’une sortie de piste. Cet accident, loin d’être le seul de sa carrière, ne le perturbera pas très longtemps puisque quelques jours plus tard, il remporte coup sur coup, et dans la même journée, la sixième manche du championnat allemand de voitures de sport dans deux catégories différentes. C’est donc en 1957 que sa carrière en Formule 1 débute officiellement, toujours pour le compte de la Scuderia Ferrari. Cette année-là, l’écurie italienne compte sur son armada de pilotes pour défier et vaincre le grand Juan-Manuel Fangio. Ainsi, à Buenos Aires, sept Ferrari D50 sont alignées, dont six pour le team de Maranello. Von Trips fait parti de ceux-là, même s’il est, dans un premier temps, non-engagé. Finalement, c’est avec la n°18, également pilotée par Perdisa, que l’allemand participe au grand-prix, du moins, quelques tours. Au moment du départ, c’est l’italien qui prend le volant mais après une trentaine de boucles, ordre est donné de laisser le volant à Collins, autre pilote de la Scuderia mais déjà sur le carreau. Au soixante-cinquième passage, l’anglais, alors revenu en cinquième position, s’arrête de nouveau aux stands et sort de la voiture, laissant sa place à Von Trips. Le néophyte de la Formule 1 réalise une belle dernière partie de course, maintenant la sixième place, à deux tours du vainqueur du jour, Juan-Manuel Fangio. Fort de ce premier top 6 (position qui n’offrait pas de points à l’époque), le jeune allemand se voit proposer de courir à Monaco, théâtre du grand-prix le plus attendu de l’année. Désormais lié à la firme au cheval cabré, il court dans différentes catégories, notamment en voitures de sport, que ce soit pour les 1000km de Buenos Aires, les 12 Heures de Sebring, les Mille Miglia, les 1000km du Nürburgring ou le grand-prix du Venezuela. Sa saison est faite de hauts et de bas mais avec une deuxième place sur la longue classique italienne, à seulement trois minutes du vainqueur Taruffi, sa campagne 1957 est déjà réussie. En terres monégasques, Von Trips se voit attribuer une 801 avec laquelle il obtient la neuvième place sur la grille, à près de cinq secondes de la pole position. Profitant des incidents en piste mêlant Moss, Hawthorn et Collins, le voilà en troisième position après seulement quatre boucles ! Cette place, il la maintiendra un long moment jusqu’à ce que le directeur de course de Ferrari demande un changement de pilote pour permettre à Hawthorn de revenir en piste. Si l’échange se fait rapidement, trois tours plus tard, l’allemand retrouve le volant de sa machine, son équipier anglais n’étant visiblement pas confortable dans une voiture pas vraiment adaptée à sa taille. Filant à toute allure vers son premier podium, la nouvelle recrue de la Scuderia connaît un terrible revers lorsqu’à huit boucles du but, son moteur serre et l’expédie dans le mur. Malgré cette désillusion, l’écurie italienne le sollicite une dernière fois à Monza, pour le grand-prix national. Sur un tracé dépourvu de son anneau de vitesse, l’allemand s’élance huitième mais grâce au jeu de l’aspiration et bénéficiant d’une machine plutôt fiable, il grimpe dans la hiérarchie pour s’adjuger, sous le drapeau à damier, une troisième position bien méritée, synonyme de premier podium en catégorie reine, un petit exploit pour ce nouvel arrivant. Face à ces débuts prometteurs, la Scuderia lui confie un volant presque à temps plein pour 1958 avec déjà, de belles perspectives d’avenir en vue…

Pour cette nouvelle saison qui s’ouvre, la Scuderia présente la D246. Là où les anglais commencent à mettre le moteur derrière le pilote, l’écurie italienne décide de rester sur sa philosophie et de laisser son V6 à l’avant de la monoplace. Pour ce premier rendez-vous, en Argentine, la quatrième D246, dévolue à Von Trips, n’est pas encore prête. Ses débuts dans en championnat du monde 1958 de Formule 1 devront attendre. Il se consolera avec la course d’endurance des 1000km de Buenos Aires, achevés en deuxième position avec ses équipiers Gendebien et Musso sur une magnifique Ferrari 250 TR. Après avoir renoncé lors des 12 Heures de Sebring, l’allemand retrouve le top 3 lors des Mille Miglia, avec une troisième place à l’arrivée en compagnie de Mike Hawthorn. Ce n’est qu’au mois de Mai que sa place en catégorie reine des grands-prix lui est restituée et c’est avec la manche de Monaco que tout débute. Qualifié onzième et dernier pilote Ferrari sur une voiture qu’il découvre, Von Trips réalise une course solide, enchaînant les dépassements et profitant des abandons pour remonter rapidement dans la hiérarchie. A mi-course, le voilà déjà au quatrième rang, derrière ses équipiers Musso et Collins mais à neuf boucles du but, son moteur rend l’âme. Il sera classé sixième, à la porte des points. Si la chance revient pour la manche allemande du championnat du monde des voitures de sport, au Nürburgring, avec au bout du compte une troisième place, l’épreuve des 24 Heures du Mans ne lui réussira pas. Quatrième lors des 12 Heures de Reims sur une Ferrari de sa propre équipe, Von Trips démontre ici son aisance sur le tracé français en inscrivant son nom à la troisième place du grand-prix de Formule 1, couru sur la même piste le lendemain de l’épreuve d’endurance. Son dimanche fut loin d’être facile puisqu’après avoir laissé sa voiture à Collins pour la qualification, son temps réalisé le jeudi n’est pas retenu. C’est donc de la toute dernière place que l’allemand s’élance. Bénéficiant d’une très grosse vitesse de pointe, sa Ferrari D246 remonte rapidement le peloton pour se caler sur la dernière marche du podium à dix tours du but. Ce grand-prix verra d’ailleurs la disparition de l’un de ses équipiers, Musso, accidenté par excès de fougue avant de succomber à ses blessures. Les week-ends se suivent mais ne se ressemblent pas, à l’instar de ce rendez-vous manqué à Silverstone, touché par un nouveau bris mécanique alors qu’il évoluait en fond de top 6. Sur son tracé fétiche du Nürburgring, la chance n’est pas encore de son côté. Ralenti par des problèmes de freins dès le premier tour, il perd de nombreuses positions avant de remonter petit-à-petit après un arrêt aux stands pour finalement accrocher le quatrième rang, à plus de six minutes du vainqueur Brooks. Sa seule consolation restera le meilleur classement d’un pilote de la Scuderia dans l’Enfer Vert ce jour-là, ses équipiers ayant tous subi des avaries. Avant d’entamer ses deux dernières sorties Formule 1 de l’année, au Portugal et en Italie, Von Trips s’exile en Autriche le temps d’un week-end pour disputer une course hors-championnat des voitures de sport. Pour la seule fois de 1958, c’est la victoire qui l’attend, non pas sur une machine du cheval cabré, mais sur une Porsche 718 RSK, à peine une seconde devant son adversaire du jour, Jean Behra. L’année de compétition touche à sa fin mais en Formule 1, les titres sont toujours à décerner. S’il ne joue absolument rien en raison de ses nombreuses courses manquées, son équipe peut toujours rêver du sacre des constructeurs, grande nouveauté dans la discipline. Hélas, avec une cinquième place à Porto, les choses commencent mal. Tout ira de travers à Monza où, suite à un gros contact avec la BRM de Schell, le malheureux allemand finit éjecté de sa monture. Plus de peur que de mal pour Von Trips, relevé avec une jambe cassée. De longues semaines de rétablissement l'attendent, le mettant à l’écart des circuits un long moment…

1959 sera une année à part dans le palmarès de Wolfgang Von Trips. Habitué à rouler dans diverses catégories au volant de voitures toutes différentes les unes des autres, il décide de mettre de côté la Formule 1 pour se concentrer sur les plus grandes épreuves d’endurance. Son premier meeting sera celui des 12 Heures de Sebring. Associé à Jo Bonnier sur une Porsche 718 RSk, il termine troisième, à quatre tours des leaders. Sa première réapparition en catégorie reine se fera rapidement avec le grand-prix de Monaco mais sa course s’achèvera bien vite. Pilotant une Porsche 718, il ne franchira pas le cap du premier tour, accidenté avec Allison et Halford au niveau du Casino, le blessant même au visage. Cette petite parenthèse F1 terminée, il retrouve ses premiers amours avec les épreuves longues, mais le succès peine à venir malgré son coup de volant imparable. Abandon à la Targa Florio, septième aux 1000km du Nürburgring et encore un abandon aux 24 Heures du Mans, les classiques d’endurance ne lui réussissent pas vraiment. Au contraire, ses deux participations au championnat de Formule de promotion allemande se soldent par deux victoires, un moindre mal pour un pilote jouant sur plusieurs tableaux. Le 1er Août, il dispute et remporte la course hors-championnat des voitures de sport de Berlin, couru sur le terrible tracé de l’Avus. C’est lors de ce meeting que Behra subira son accident qui lui sera malheureusement fatal. Ce tragique évènement conduit l’écurie Porsche à déclarer forfait pour le grand-prix de Formule 1 dans lequel la marque de Stuttgart s’était engagée avec des Formule 2, dont une dévolue à Von Trips et une autre à Behra. Le constructeur allemand qui continuera de faire confiance à son pilote en l’engageant aux côtés de Bonnier pour le Tourist Trophy de Goodwood, achevé au deuxième rang derrière Fairman et Shelby. Pour l’ultime manche du calendrier 1959 de Formule 1, l’allemand retrouve la Scuderia Ferrari sur le tracé de Sebring, un circuit qui ne lui est plus vraiment inconnu. Sur sa D246, il mène une course très sage, occupant un long moment la quatrième place avant que sa monoplace ne tombe en panne tout près du but. Classé sixième, Von Trips rappelle à toute son écurie que son talent n’est pas usurpé. Pour la première fois depuis son arrivée en catégorie reine, il va pouvoir disputer l’intégralité de la saison, hors 500 Miles d’Indianapolis. Le discret jeune homme allait enfin faire parler la poudre…

Enfin pas tout à fait. Car en 1960, la D246 est encore de sortie et son moteur placé à l’avant commence à souffrir de la vieillesse de sa conception. Enzo Ferrari n’est pas un partisan des blocs positionnés derrière les pilotes mais son discours évoluera bien vite. Après avoir entamé son année 1960 d’une belle manière avec une deuxième place lors des 1000km de Buenos Aires, Von Trips retrouve le volant d’une Formule 1 pour ce même grand-prix d’Argentine. Qualifié cinquième devant ses acolytes Hill et Allison, il perd plusieurs positions au départ avant de remonter petit-à-petit et de récupérer son rang initial sous le drapeau à damier. Cependant, après une course, il est déjà facile de constater que les Ferrari seront à la peine tant que le moteur arrière ne sera pas implanté dans les machines italiennes. Dans le même temps, l’allemand reprend du service en Formule 2, un championnat majoritairement disputé par les pilotes de la catégorie reine. Il réussit à s’illustrer lors du grand-prix de Syracuse sur D156 F2, une première victoire en monoplace depuis fort longtemps déjà. Ses performances en voiture de sport sont également remarquables avec notamment, un retour en deuxième position lors de la Targa Florio. La F1 reprend ses droits à Monaco mais sous la pluie de la Principauté, les Ferrari sont à la peine. Von Trips renoncera au soixante-et-unième des cent tours sur problème d’embrayage, la fin d’un calvaire pour lui. A Zandvoort, les italiennes sont encore moins à l’aise qu’à Monaco, la preuve avec l’absence des bolides rouges parmi le top 10 de la grille. Ce n’est qu’au fur et à mesure que le grand-prix avance que le rythme augmente mais pour Von Trips, impossible de contrer la domination des Cooper, BRM et Lotus devant lui. Finalement, c’est à la cinquième place qu’il terminera sa course, à un tour des leaders, un moindre mal au vu des performances médiocres de sa monture. Mais si sa machine souffre dans les dunes néerlandaises, au moins rallie-t-elle l’arrivée. Que ce soit lors des 1000km du Nürburgring, au grand-prix des Pays-Bas ou aux 24 Heures du Mans, son destin est toujours identique : c’est l’abandon. En France, sur le circuit de Reims qu’il affectionne tout particulièrement, la vélocité de sa D246 lui fait entrevoir un possible gros résultat mais peu après la mi-course, sa transmission s’enraye, l’obligeant à renoncer, une fois encore. A Silverstone, les rouges sont encore largués et l’allemand, meilleur représentant de la firme au cheval cabré, ne démarre que septième, à près de trois secondes de la pole de Brabham. La course sera longue et pénible pour Von Trips, contraint d’attendre le drapeau à damier pour atteindre le sixième rang final. A partir de ce grand-prix, la tendance s’inverse nettement pour l’allemand, décidément très malchanceux. Après son triomphe lors de la manche hors-championnat sur le tracé de Solitude et une deuxième place en Formule 2 sur la boucle Sud du Nürburgring, il s’immisce par deux fois dans les points en Formule 1 avec une quatrième place à Porto puis une cinquième à Monza. Trois nouveaux podiums dans diverses catégories hors-championnat ne feront qu’augmenter sa popularité sur les circuits, même si les résultats en F1 ne sont pas toujours les plus représentatifs. Von Trips commence à se faire un vrai nom qui n’attend qu’à éclore en 1961…

Son programme en cette nouvelle année sera bien plus allégé. Exit les compétitions de Formule 2 ou autres épreuves allemandes, seules celles disputées par la Scuderia Ferrari importent. C’est donc sur deux fronts que l’allemand va jouer en 1961 : la F1 et les voitures de sport. Tout commence en Floride, à Sebring, avec la pole position pour la classique d’endurance. Les espérances sont élevées mais un problème de direction sur sa Ferrari 246SP le contraint à un abandon inévitable. Cet affront sera vite essuyé avec un retour gagnant sur le devant de la scène avec un succès plus que mérité sur la célèbre Targa Florio en compagnie de son équipier Olivier Gendebien. S’en suit un retour plus que prometteur en Formule 1, notamment grâce à la nouvelle monture de Maranello, la 156 et son nez de requin. Avec son moteur arrière, la petite monoplace italienne se montre d’emblée très véloce, même si à Monaco, c’est la légèreté de la Lotus de Moss qui fait le plus d’étincelles. Pour l’allemand, le grand-prix est un exercice de patience qui prendra fin deux tours trop tôt, V6 hors service. Malgré ce pépin, sa quatrième place est tout de même sauvée. Après les étroites rues de la principauté, place aux longues courbes de Zandvoort. Là encore, la machine italienne est la plus rapide si bien que les trois premières places de la grille sont entièrement bloquées par les rouges. Von Trips s’élance derrière Hill mais d’entrée de jeu, c’est bien lui qui vire en tête. Pour la première fois de sa carrière, la première place en Formule 1 lui appartient. La pression placée sur ses épaules par son adversaire et équipier américain n’y changera rien, l’allemand est imbattable ce jour-là. Au bout des soixante-quinze tours, le voilà enfin vainqueur de grand-prix, certes d’une courte tête, mais vainqueur tout de même. Si la Formule 1 finit enfin par lui sourire, la classique d’endurance mancelle se refuse toujours à lui. Idem sur son tracé maison du Nürburgring où un accident stoppera sa course à domicile. A Spa-Francorchamps, pour le grand-prix de Belgique, les 156 sont au-dessus du lot. Avec Hill, Ginther et l’invité Gendebien, Von Trips va dominer l’épreuve. Les positions s’échangent tour après tour entre ces quatre pilotes avant qu’un duel Hill-Von Trips ne prenne place dans la deuxième moitié de course. Les voitures sont à la limite mais sous le drapeau à damiers, l’allemand est battu pour sept dixièmes seulement. Avec un point d’avance à l’avantage de l’américain au championnat, le suspense reste entier. Le break aurait pu se faire à Reims mais sur ce circuit mangeur de moteur, le V6 de Von Trips ne tient pas la distance. Par chance, son rival ne tient pas la cadence lui non plus, à l’inverse de Baghetti, vainqueur pour son premier départ en Formule 1. La course suivante à Aintree sera bien différente. Sous la pluie anglaise, Von Trips surnage. Parti quatrième, il s’empare rapidement de la deuxième position avant de ravir le leadership à Hill au bout de sept boucles. Comme à Zandvoort, l’allemand vole vers la victoire et avec la manière, s’imposant avec près de quarante-six secondes d’avance sur son équipier. A trois courses du but, Von Trips vole vers un titre presque inespéré tant son expérience en F1 se limite à quelques meetings par-ci par-là. Au Nürburgring, il déjoue les éléments et devance une fois encore Hill à l’arrivée avec la deuxième place derrière Moss, synonyme d’avantage accru au championnat du monde. Avec quatre points de mieux que son rival, la consécration peut avoir lieu à Monza, fief des tifosi et de la Scuderia. Sur le mythique tracé italien et son légendaire anneau de vitesse, utilisé pour la dernière fois de l’histoire, le pilote Ferrari s’arrache et réalise la première pole position de sa carrière. Elle restera à jamais unique. Le 10 Septembre, c’est le jour du grand-prix et peut-être le jour de gloire pour l’allemand. Après un mauvais premier tour, il tente de remonter sur la tête de course. Au deuxième passage, alors qu’il s’apprête à aborder la Parabolica, le pilote de la monoplace n°4 dévie de sa trajectoire pour élargir au maximum. Problème, à sa gauche, se trouve la Lotus de Jim Clark. L'incompréhension est totale. Les deux machines s’accrochent. Si celle de l’anglais reste sur la piste, celle du récent poleman fonce droit vers les talus, décolle vers le public, fauche plusieurs personnes, avant de retomber lourdement sur le bitume, éjectant son pauvre pilote au passage. Wolfgang Von Trips venait de mourir, comme quatorze spectateurs. Un jour sombre de l’histoire de la Formule 1 venait de s’écrire.

Von Trips ne connaîtra donc jamais de couronne mondiale. Phil Hill finira par rafler la mise et empocher un titre qui aurait probablement dû ne pas lui revenir. En signe d’hommage, la Scuderia Ferrari ne participera pas à la dernière manche à Watkins Glen. Très discret, l’allemand n’aura jamais eu la chance de bien finir. Très souvent pris par les ennuis techniques, son talent n’avait rien à envier aux meilleurs de l’époque. Sa justesse de pilotage sur tout type de voiture lui assurait une carrière toute aussi prometteuse dans diverses catégories. Il ne deviendra pas le premier champion allemand de l’histoire, titre décerné à Michael Schumacher en 2000. Drôle de coïncidence lorsque l’on sait que Von Trips venait d’ouvrir un circuit de karting en 1961 à Kerpen, piste reprise par un certain Rolf Schumacher, père de Michael et Ralf…

Wolfgang Von Trips en chiffres...

Meilleur classement en championnat du monde F1 :

2e (1961)

Grands-prix :

27 (30 engagements)

Victoires :

2

Podiums :

6

Poles Position :

1

Meilleurs Tours :

0

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