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Jean Alesi

Alesi était l’un des meilleurs pilotes français trop souvent poursuivi par la malchance...

C’est en 1964 que Jean Alesi voit le jour à Avignon, non loin de la côte d’Azur et de l’Italie, ses terres de cœur. Directement bercé par le monde de l’automobile par son père carrossier, il ne lui fallait qu’un pas pour devenir pilote. Dès son plus jeune âge, il use les pistes à bord de kartings, remportant sa catégorie dès 1982. Dès lors, les expériences de conduite s'enchaînent : coupe Renault 5, Formule Renault puis Formule 3, le petit à du talent. En 1986, il termine vice-champion de France de la discipline, derrière un certain Yannick Dalmas avant de décrocher la timbale l’année suivante avec pas moins de sept succès, de quoi susciter un certain intérêt des équipes de haut niveau, autant en monoplace qu’en endurance. C’est donc sans étonnement qu’il rejoint, en 1989, le très relevé et mythique championnat de Formule 3000. Les débuts ne sont pas faciles et malgré un podium à Pau, il ne fera pas mieux que dixième au championnat. Pourtant, son coup de volant est loin de passer inaperçu si bien qu’une seconde chance lui est donnée en 1989. Au sein de l’équipe d’Eddie Jordan, Alesi va remporter pas moins de trois courses et le championnat avec 39 points, soit le même nombre d’unités qu’Erik Comas alors qu’il n’a disputé que neuf des dix rendez-vous programmés. Son absence est justifiée mais ce n’est pas sa participation aux 24 Heures du Mans qui en est la conséquence mais plutôt un petit séjour au Japon, sur le circuit de Suzuka, pour son septième grand-prix de Formule 1…

Car oui, en 1989, Jean Alesi pilotait déjà en F1. Son arrivée en catégorie reine n’a rien d’un hasard, même si la précocité à de quoi étonner. Après le grand-prix du Canada 1989, Alboreto, alors titulaire chez Tyrrell, se voit gentiment poussé à partir pour une histoire de sponsoring et de gros sous. Beaucoup de noms arrivent sur la liste de l’Oncle Ken mais c’est bien le petit frenchy qui sera l’heureux élu. Et quoi de mieux pour l'avignonnais que de démarrer à quelques kilomètres de sa ville natale, sur le tracé Paul Ricard ? Qualifié en deuxième moitié de peloton, la jeune recrue n’a qu’un objectif : terminer la course. Il fera mieux, beaucoup mieux. Après avoir évité le carnage du premier départ, il se met en chasse des Benetton, Lotus et Ferrari et tient le rythme. Mieux encore, il évite les erreurs et au prix d’une fiabilité exemplaire, il tient les points et même la quatrième place à l’arrivée, à moins de sept secondes de la Williams de Patrese troisième, un réel exploit. Ken Tyrrell à parier sur le bon cheval. Le soir du grand-prix, le contrat est signé pour la fin de saison et la suivante. Un tête-à-queue à Silverstone plus tard puis deux bonnes performances mais sans points à Hockenheim et Budapest, Alesi retrouve les sommets avec une belle cinquième place en Italie, sa patrie de cœur, lui né de parents siciliens. A Jerez, il n’hésite pas à se frotter à Brundle à plusieurs reprises pour lui ravir quelques points, pari qu’il gagnera puisqu’il terminera à nouveau au pied du podium malgré sa modeste Tyrrell, un nouvel exploit qui ne fait que renforcer sa notoriété, lui qui vient tout juste de sceller son titre de F3000 au Mans. Ses deux dernières sorties seront moins glorieuses avec deux abandons successifs mais quoi qu’il en soit, l'avignonnais à plus que rempli son rôle. A lui seul, et alors qu'il n’a couru que la moitié des épreuves de l’année, Alesi a inscrit la moitié des points de son équipe, largement devant Alboreto et Palmer, présents avant lui. La saison 1990 s’ouvre dans les rues de Phoenix, sur un tracé détesté par l’entièreté du paddock. Lors des qualifications, surprise : les pilotes chaussés de Pirelli, dont Alesi, sont particulièrement véloces ! Voilà l'avignonnais quatrième sur la grille, un bel exploit en somme. Mais Jean en a encore sous le pied et le dimanche, la performance est exceptionnelle. Dès l’extinction des feux, sa Tyrrell passe en tête devant les McLaren de Berger et Senna. Si l’autrichien finit par se sortir rapidement, le français compte huit secondes d’avance sur le pauliste et stabilise même l’écart ! A mi-course, le champion brésilien est revenu dans les échappements d’Alesi mais dépasser reste compliqué. Après une première tentative infructueuse, Ayrton finit par trouver l’ouverture lors d’un ralentissement généré par des retardataires. Jeannot doit s’incliner mais pour autant, il ne lâche pas sa seconde place qu’il tiendra jusqu’à l’arrivée. La Formule 1 venait de connaître l’éclosion d’une vraie pépite. Reste à confirmer sur le reste de la saison. Pari réussi avec le point de la sixième place à Imola et surtout, un nouveau podium dans les rues de Monaco, intercalé entre les deux McLaren avant de terminer à deux secondes du leader brésilien. Malheureusement, le manque de développement de sa Tyrrell et la mauvaise tenue des gommes italiennes réduisent grandement ses chances de réussite. Il réalise pourtant de belles performances avec de très bonnes qualifications à Monza et Jerez avant d’être victime de sortie de piste le jour de la course. A Suzuka, un accident le blesse sérieusement au cou. Résultat, des muscles touchés, le forfait est inévitable. Pour la dernière de l’année à Adélaïde, il se qualifie cinquième avant de descendre au huitième rang le dimanche. Sa saison se termine en neuvième place au classement général, comme en 1989, mais avec cinq unités supplémentaires. Son coup de volant et sa fougue font des émules parmi les tops team, notamment chez Williams et Ferrari. Pour l'avignonnais, le choix est cornélien : vaut-il mieux choisir la puissance et la performance du V10 Renault des anglaises ou la passion et la mélodie du V12 italien ? Le cœur finira par parler…

Et quoi de mieux que de commencer son rêve d’enfant coéquipier de son idole Alain Prost ? Alesi ne pouvait espérer mieux, enfin peut-être une voiture fiable. La Ferrari 642 est assez compétitive mais la fiabilité manque cruellement. Pour ne rien arranger, les tensions plus que présentes entre Prost et Fiorio, directeur sportif de la Scuderia, tendent l’atmosphère de travail. Si tout le monde s’attendait à un remake de Prost-Senna, il n’en sera rien. Les McLaren et Williams vont survoler les débats en cette année 1991. Après avoir manqué de peu le podium à Phoenix, l’avignonnais connaît ses premiers pépins en rouge. A Imola, la première des deux courses à domicile des italiens, il sort de la piste dès le troisième tour alors que Prost, lui, n’avait même pas pu prendre part au départ. A Monaco, malgré un châssis des plus complexe à mettre au point, il s’illustre en s’invitant sur la troisième marche du podium mais les soucis ne sont pas loin. Casse moteur au Canada puis panne d’embrayage au Mexique, rien ne va à Maranello. En hâte, Ferrari construit une nouvelle machine, la 643, avec laquelle il empochera deux nouveaux podiums, mais aussi beaucoup d’abandons. A Spa-Francorchamps, la puissance retrouvée le propulse en tête du grand-prix et des gros espoirs de succès sont entrevus mais à treize boucles du but, le V12 italien serre. La déception est immense pour Jeannot qui devra attendre, encore longtemps, que son heure vienne enfin. De plus, Prost claque la porte de la Scuderia à une course de l’issue du championnat après avoir tergiversé toute la saison sur son envie réelle de piloter. Les tensions incessantes auront plus que joué dans les interminables prises de bec entre les pilotes et la direction des rouges. Les deux années suivantes ne seront guère meilleures. En 1992, alors que les Williams, qu’aurait pu piloter le français, surperforment, dominant de la tête et des épaules la F1 avec sa monoplace bardée d'électronique. Chez Ferrari, Jean se voit rejoindre par Capelli, très vite décevant. La F92A est une catastrophe. C’est la pire monoplace conçue par la Scuderia depuis la pâle campagne 1980. Avec seulement trois podiums en tout et pour tout en 1992, Jean ronge son frein. Les problèmes de fiabilité s’enchaînent à vitesse grand V, les erreurs de pilotage aussi. L’avignonnais a beau être rapide et agressif, son excès d’optimisme dans certaines conditions finit par lui coûter cher. Ainsi, il se mettra à dos M.Schumacher, Berger ou Häkkinen. Il finira par inscrire un total de 18 points sur toute la saison, tout cela en ne voyant l’arrivée qu’à six reprises sur les seize départs effectués. Petite anecdote : la F92A était si mauvaise que la Scuderia l’a gentiment offerte à Alesi en cadeau, histoire de s’en débarrasser ni vu, ni connu. Ce championnat désastreux devait rapidement se faire oublier dès 1993 mais problème, la F93A n’est qu’une évolution de l’ancienne monoplace. Si les voitures rouges (et désormais un peu blanches), croisent plus souvent la ligne d’arrivée, les résultats sont loin du compte. Les suspensions actives ne sont pas au niveau des Williams ou McLaren ce qui condamnera évidemment Alesi et son nouvel équipier Berger à jouer les outsiders. Mais l’été 1993 vit l’arrivée au sein de la Scuderia de Jean Todt, véritable chef d’orchestre des grandes années qui suivront pour l’écurie italienne. Deux podiums au compteur et une sixième place finale malgré deux points de moins au classement général, voilà de quoi poser quelques questions sur son avenir à Maranello. Mais Jeannot veut y croire. Heureusement pour lui, la méthode Todt est en marche…

En 1994, Ferrari sort la 412 T2, monoplace censée apporter le renouveau de la Scuderia. Le travail abattu est impressionnant mais Williams et surtout Benetton ont plus rapidement compris comment gérer ces nouvelles machines désormais dépourvues de toutes aides au pilotage. Mais après la première course à Interlagos, lors d’une session privée au Mugello, c’est le drame : Alesi sort très violemment de la piste et se fracture trois vertèbres. En cas de nouveau choc, les dégâts pourraient être irréversibles. Sur les conseils du docteur Saillant, l’avignonnais reste à pied pour les grands-prix du Pacifique et de Saint-Marin. Jean ne connaitra alors jamais la mort sur circuit, lui qui évita ce funeste week-end d’Imola. Son retour à Monaco se solde par une solide cinquième place avant que le podium ne lui tende les bras sur son tracé fétiche de Montréal, lui qui arbore fièrement le n°27 du regretté Gilles Villeneuve, véritable icône au Canada. Une grosse évolution de la 412 T1, devenue 412 T1B à partir du grand-prix de France, fait naître de nouveaux espoirs chez les italiens qui ne tardent pas à retrouver le chemin du succès en Allemagne grâce à Berger, une première depuis près de quatre ans, une éternité pour les cloches de Maranello. Alesi espère lui aussi tirer les marrons du feu mais avec son accident en France et ses cinq abandons successifs durant l’été finissent par compromettre ses chances. Il n’empêche que sa monture joue maintenant régulièrement les premiers rôles, en témoigne sa première pole position en carrière devant les tifosi de Monza, sa presque maison. Le V12 italien, qui chante merveilleusement bien, fait des merveilles à haut régime et le français l’a bien compris. Plus rapide que quiconque tout au long du week-end, Alesi n’a qu’une chose en tête : gagner. Après un premier départ avorté, le pilote de la n°27 caracole encore en tête, jouissant d’une avance de dix secondes sur son équipier, deuxième. Mais au moment de s’arrêter pour la première fois, désastre total : la Ferrari refuse de repartir des stands, boîte hors service. La désillusion est immense et le désespoir du pilote fait peine à voir. Jeannot finira par s'éclipser du circuit dans la plus grande discrétion, coupant tout contact avec le monde extérieur le temps de digérer cette cruelle défaite. Un dernier podium sous la pluie de Suzuka viendra achever sa meilleure saison en rouge bien qu’étant largement battu par Berger au général, 24 à 41. Arrive ensuite la saison 1995, deuxième sous la domination Schumacher. La 412 T2 est classique mais performante et ferait presque jeu égal face aux Benetton et Williams, de bon augure pour la suite du championnat. Dès les premières courses, les podiums et les points s’accumulent, permettant à Alesi de figurer parmi le top 3 du championnat un très long moment. Passé proche d’un premier succès en Argentine et à Imola, le français se demande si son heure viendra un jour, à croire que la malchance soit innée en lui. A Monaco, il tient une belle deuxième place, à peine plus de dix secondes derrière M.Schumacher lorsqu’à la sortie du tunnel, Brundle sort de piste. Le seul moyen d’éviter la Ligier est de taper le rail également… Le 11 Juin 1995, date de son 31ème anniversaire, Jean s’élance cinquième pour le grand-prix du Canada et espère accrocher un podium. Ce sera encore mieux. Rapidement remonté au deuxième rang derrière l’intouchable Schumi, le pilote Ferrari gère son rythme mais à douze tours du but, alerte sur le muret des stands Benetton. La boîte de vitesses de l’allemand fait des caprices et seul un changement de volant et quelques ajustements informatiques pourront résoudre le problème. Grâce à une fiabilité retrouvée, Alesi prend la tête et file vers cette première victoire qui se sera tant refusée à lui. Dans le dernier tour, alors que la piste commence déjà à être envahie par des spectateurs inconscients, Jean pleure de joie sous son casque. Si ce n’est pas en Italie ou en France qu’il gagne, c’est au Canada qu’il le voulait, la patrie de Gilles Villeneuve, héros local sur sa Ferrari n°27. Le français n’en revient pas et pour cause, sa monture le lâche dans son tour d’honneur ! L’avignonnais rejoindra le podium sous les hourras et cris du public mais sur la Benetton de M.Schumacher, celle-là même qui lui offrit la victoire finalement. Mais peu après ce moment de liesse, c’est la douche froide : la Scuderia vient de recruter le rival allemand et doit se débarrasser de l’un, voire des deux pilotes. Alesi digère mal cette décision mais qui dit départ de Schumacher de chez Benetton dit place libre. L’option à de quoi faire réfléchir. Pour autant, Jean se concentre totalement sur sa saison 1995 et bien que le titre soit perdu d’avance face à un Schumi des grands jours, la victoire est toujours possible. Possible mais inatteignable lorsque la malchance vous frappe continuellement. A Spa-Francorchamps, il pointe en tête dès les premiers kilomètres mais une rupture de suspension l’oblige à stopper sa course très tôt. A Monza, il caracole en tête devant son équipier Berger lorsqu’à vingt tours du but, une caméra de la FOM se détache de sa monture. A plus de 300 km/h, la caméra vient se fracasser contre le triangle de suspension avant-droit de la 412 T2 n°28, brisant l’élément en question. Pour ne rien arranger, Alesi voit son grand-prix s’arrêter huit tours trop tôt, roulement de roue défectueux. Les désillusions s’accumulent, comme ici au Nürburgring où la première place lui tend les bras un très long moment avant que l’imbattable Schumacher ne lui ravisse la première place à trois tours du but. Sa collaboration avec la Scuderia s'achève sur un nouvel accrochage, avec le nouveau double champion du monde en l'occurrence. Beaucoup de regrets mais pas de remords. La Scuderia restera à jamais gravée dans son cœur…

Pour 1996, le changement est fait. Alesi rejoint donc officiellement les rangs de la championne Benetton avec Berger, lui aussi écarté par l’écurie italienne fin 1995. Avec le statut de favori, Jeannot entend bien contrer sa malchance, comptant énormément sur la fiabilité hors pair du fameux V10 Renault. Problème, la B196 n’est clairement pas au niveau de la B194 et B195 qu'exploitent à merveille un certain M.Schumacher. De plus, le team anglo-italien est gouverné par l'excentrique Flavio Briatore, un personnage haut en couleur qui ne sera pas le plus apprécié par le français. Sa collaboration avec l’équipe multicolore débute par un bête accrochage dans les rues de Melbourne avec Irvine, nouveau pilote Ferrari. Tout cela sera vite oublié avec un retour rapide sur le podium sous la pluie de Sao Paulo mais toujours pas de victoire en vue. Tout au long de l’année, cette première marche se refusera à lui. Pas faute d’essayer pourtant. L’avignonnais se bat comme un beau diable mais rien à faire, les Williams, pourtant équipée du même bloc, sont bien plus véloces. Même les Ferrari se mettent à gagner. En Espagne, alors que M.Schumacher sous la pluie torrentielle, Alesi se classe second après une course propre, mais à plus de quarante-cinq secondes de la tête… À Monaco, l’hécatombe qui touche tous les pilotes le propulse en tête avec une large avance mais à une dizaine de boucles du but, nouveau problème de suspension… Abonné à la troisième marche du podium, le français ne peut que constater le gouffre qui le sépare du haut du tableau occupé par le tiercé Hill - Villeneuve - M.Schumacher. Dès que le pilote de la B196 termine, c’est toujours dans les points mais quelques petites unités par-ci par-là ne pourront l'aider à évoluer parmi les leaders. Même Schumacher, à qui il tenait tête un long moment au général, finira par se détacher, notamment grâce à ses deux succès à Spa-Francorchamps et Monza. Il se classera quatrième du championnat, terminant sur un nouveau crash à Suzuka dans le premier tour, de quoi faire grincer des dents son patron Flavio… Mais pour autant, Alesi croit en la B197, développée depuis déjà plusieurs mois. Malheureusement pour lui, ce sera un échec. Moins performante que sa devancière, la nouvelle machine bleue, blanche et rouge posera bien plus de problèmes. Pour ne rien arranger, Jeannot commet des erreurs de plus en plus grossières, notamment lors de la manche d’ouverture en Australie où, absorbé par la course, il ne se rend pas compte que sa radio dysfonctionne et que sa jauge d’essence descend dangereusement. Malgré un panneautage à chaque passage, la Benetton finit par tomber en panne sèche, de quoi laisser fuser quelques noms d’oiseaux dans le garage des champions 1995. Au Canada, il échoue pour deux secondes à arracher un deuxième succès face à M.Schumacher dont la Ferrari fait des merveilles depuis son arrivée. La B197 reçoit quelques évolutions qui porteront leurs fruits puisqu’en Allemagne , Berger arrache la première place après s’être élancé de la pole position alors qu’Alesi ne finit que sixième. Le français renoue avec la pole à Monza mais un arrêt ravitaillement une seconde trop long condamnera une nouvelle fois ses chances de succès, peut-être ses dernières en carrière. Après un terrible vol plané en Autriche, l’avignonnais fait une annonce : bye-bye Benetton à la fin de la saison, bonjour Sauber-Petronas. Un dernier podium pour le grand-prix du Luxembourg parachèvera cette petite excursion anglo-italienne qui n’aura clairement pas couru au succès escompté. Qu’en sera-t-il chez les Suisses ? Réponse en 1998 et 1999…

Alesi le sait : sa monture ne lui permettra sûrement pas de jouer les premiers rôles. Ce qui le motive par-dessus tout, c’est le travail avec les ingénieurs Ferrari car oui, les Sauber sont équipées du V10 italien, rebadgé pour l’occasion. La C17 est une jolie monoplace répondant désormais au tout nouveau règlement. L’apparition de ces monoplaces plus étroites et des pneumatiques striés coïncide d’ailleurs avec le déclin du français. Bien sûr, sa modeste écurie peut lui promettre des podiums. Le team de Peter Sauber, comme les Minardi, Prost ou Stewart, ne sont là que pour récupérer les miettes laissées par les gros bras en cas de défaillance. La saison ne démarre pas trop mal avec deux arrivées parmi le top 6 à Buenos Aires et Imola, là où sa monture arborait ces affreux ailerons haut-perchés. Mais la dure réalité arrive vite et le bas du classement est souvent visité. A Montréal, il se fait percuter à deux reprises lors des deux départs, une première fois après avoir envoyé Wurz en tonneau, une seconde fois en s’accrochant très violemment avec Trulli. Le français ne peut plus espérer grand chose, si ce n’est bénéficier de la chance, lui qui aura toujours été chat noir. Pourtant, en Autriche, sur une piste séchante, le pilote Sauber pointe au deuxième rang, auteur d’un tour magistral à une minute de la fin de séance, uniquement battu par Fisichella. Le lendemain sera une autre histoire, l’avignonnais finissant par abandonner, percuté par … Fisichella ! Mais si l’Autriche ne lui a pas réussi totalement, Spa-Francorchamps sera royal. Évitant le carnage du premier tour, Alesi se positionne sur la grille du second départ, espérant tirer partie des conditions apocalyptiques. Pari gagnant. Après le nouvel accident à la Source, l’accrochage M.Schumacher - Coulthard et la sortie de piste de Fisichella, le voilà troisième derrière les deux Jordan ! Aussi incroyable que cela puisse paraître, Jeannot est un sérieux prétendant à la victoire ! Malheureusement pour lui, Coulthard, pourtant attardé, décide de s’intercaler entre la Sauber et les voitures jaunes, empêchant l’avignonnais d’attaquer pour la tête. Il terminera troisième à trois secondes du vainqueur Hill pour ce qui restera son dernier podium en catégorie reine. De nouveau dans les points en Italie avec la cinquième position, il ne peut que constater sa terrible chute par rapport à l’année écoulée : onzième au championnat avec neuf points, dur à digérer. La pilule sera encore plus difficile à avaler en 1999 à bord d’une C18 capricieuse et terriblement fragile. Neuf abandons en seize meetings, deux petits points à l’arrivée, la claque fait mal. Jamais dans le coup, battu par son équipier Diniz pour une unité au classement général, la dernière année de l’ancien millénaire est terrible pour le français. Son avenir s’inscrit clairement en pointillé, lui le jeune talent que tout le monde s’arrachait il y a à peine dix années de cela, lui qui était si fier d’avoir un certain Prost en équipier chez les rouges… Prost ? Celui qui a sa propre équipe ? En voilà une belle opportunité pour continuer en F1, surtout auprès d’un ami ! Choix de raison ou choix de coeur ? Le futur sera on ne peut plus clair à ce sujet… Nouveau millénaire, nouvelle équipe pour Alesi. Prost Grand-Prix a brillé en 1997 avant de se perdre dans les méandres du classement en 1998 et 1999, la faute, principalement, à un moteur Peugeot raté et des tensions plus que vivaces entre le team tricolore et le motoriste au Lion. L’AP03 est toute nouvelle mais extrêmement fragile. Jamais le français ne connaîtra de voiture aussi médiocre que la belle bleue. Pas performante, pas fiable, pas rapide, rien ne va. Ni lui, ni son équipier Heidfeld n’arriveront à en tirer quelque chose. Pour ne rien arranger, Jean multiplie les erreurs de pilotage, faisant de lui la coqueluche des Guignols de l’info. Sa seule chance de scorer, à Spa-Francorchamps, se termine prématurément avec un problème de pression d’essence. A Hockenheim, il est victime d’une très grosse sortie de piste à près de 300 km/h, heureusement sans conséquences physiques. En revanche, son accrochage avec l’autre Prost en Autriche aura des conséquences, morales cette fois-ci. En dépit d’efforts acharnés, l’écurie française repart avec un zéro pointé, une première pour l’avignonnais. 2001 s’annonce un peu mieux avec l’abandon du V10 Peugeot pour le V10 Ferrari. Les essais d’avant-saison sont plus que réussis avec des temps affolants les compteurs mais pour beaucoup, cela n’est que du bluff. Faire croire à une folle réussite est bon argument de vente pour faire venir les sponsors et renflouer les caisses désespérément vides. Par chance, la fiabilité est retrouvée mais rien à faire, la performance manque à l’appel et malgré tout son talent et son agressivité, Alesi peine à s’immiscer parmi le top 6. Il y arrive toutefois à trois reprises, à Monaco, au Canada puis en Allemagne, glanant les tous derniers points de l’écurie tricolore. Mais en coulisses, l’entente entre Prost et Alesi n’est plus cordiale. Au soir du grand-prix allemand, Jeannot décide de quitter l’écurie avec effet immédiat. Direction Jordan pour remplacer au pied levé Frentzen, l’allemand faisant le chemin inverse. La monture de son ancien patron en F3000 est certes plus performante que sa modeste Prost, Alesi n’obtiendra qu’un seul nouveau point à Spa-Francorchamps, son dernier en carrière. Pour son dernier grand-prix, à Suzuka, il percute violemment la Sauber de Raikkonen en perdition. Triste fin pour un si grand talent.

L’avignonnais n’abandonne pas la Formule 1 pour autant. Les années suivantes, il travaillera pour le développement chez McLaren-Mercedes, courant en parallèle en DTM. Malgré quatre victoires, il se retrouvera loin de ses équipiers. Il disputa ensuite deux saisons du championnat de stock-car Speedcar Series avant d’effectuer quelques piges en endurance avec Ferrari. En 2012, il se lance le pari fou de s’essayer aux 500 Miles d’Indianapolis avec le soutien de Lotus. Toujours aussi malchanceux, on lui demandera de quitter le circuit pour excès de lenteur ! Aujourd’hui, Alesi est consultant Formule 1 pour la télévision, ne cachant toujours pas son admiration pour les rouges, lui, toujours autant adulé en Italie comme au Canada, comme quoi, les coups de cœur ont du bon.

Jean Alesi en chiffres...

Meilleur classement en championnat du monde F1 :

4e (1996, 1997)

Grands-prix :

201 (202 engagements)

Victoires :

1

Podiums :

32

Poles Position :

2

Meilleurs Tours :

4

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