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Circuit du Nürburgring - Allemagne

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C'était l'un des circuits les plus dangereux et imprévisibles de toute l'histoire de la Formule 1 et le dompter relève quasiment de l’impossible. Retour sur l'histoire du terrible Enfer Vert, le Nürburgring.

Dans les années 50, 60 et 70, il est un circuit que les pilotes redoutaient avec Spa-Francorchamps et Monza, le terrible Nürburgring, ou plutôt la Nordschleife. Longue de 22,8 km, la boucle nord fut la première à représenter l’Allemagne en Formule 1 en 1951 et ce, jusqu’en 1976. Excepté 1955, 1959, 1960 et 1970, les pilotes s’affrontèrent sur une piste jonchée de 176 virages, tous différents les uns des autres. Comme si cela ne suffisait pas, le vertigineux circuit comprend d’importants dénivelés et bosses, faisant souvent décoller des quatre roues les monoplaces, offrant aux photographes des clichés surréalistes. Situé en grande partie en forêt, le tracé du Nürburgring dispose d’un climat assez humide, compliquant encore plus la tâche de ceux menant leur bolide à 300 km/h sur l’étroit goudron bordé d’herbe et de barrières. Les courses ne comptaient pas beaucoup de tours mais terminer l’un d’entre eux relevait toujours du défi. Avec son très célèbre “Karussel”, le circuit allemand se plaça rapidement comme le circuit le plus dangereux au monde et bon nombre de ceux qui s’y sont aventurés y laissèrent quelques pièces, parfois plus. Car oui, la Nordschleife était impitoyable. Ils sont cinq à y avoir laissé leur vie : Onofre Marimon, Peter Collins, Carel Godin de Beaufort, John Taylor et Gerhard Mitter. Avec des éléments de sécurité inexistants, la piste allemande fut souvent pointée du doigt en raison de sa dangerosité menant, à la demande d’un comité mené par Stewart, à l’aménagement d’infrastructures plus modernes en 1970. L’installation de glissières et le gommage de certaines bosses en rassura plus d’un, pourtant, cela ne fut pas suffisant. C’est en 1976 que la Nordschleife fit ses adieux à la Formule 1, et quels adieux. C’est lors de cette célèbre course que l’un des drames les plus connus de l’histoire se joua. Au deuxième tour de course, Lauda, sur sa 312 T2, quitta la piste à grande vitesse. Dans un choc impressionnant, sa Ferrari s’embrasa instantanément avant d’être percutée par Lunger. Les images font froid dans le dos. Sans son casque, arraché dans l’accident, l’autrichien se retrouve au cœur d’une véritable fournaise et ce n’est que le courage des pilotes arrêtés, prêts à mettre leurs mains au feu, qui sauva le champion du monde sortant de l’époque. Mais contrairement aux idées reçues, ce n’est pas cet incident qui coûta la place du Nürburgring en Formule 1. Tout se déroula auparavant, en coulisses. Sans licence pour figurer aux prochains championnats et très critiqué par les pilotes eux-mêmes, le vertigineux tracé allemand quitta le haut niveau par la petite porte.

Pourtant, sa notoriété en fait un des tracés légendaires de la Formule 1 et s’y imposer relève du grand art. Les plus grands de l’époque l’ont tous remporté un jour ou l’autre. Ascari, Fangio, Hill, Surtees, Clark, Hunt... Mais il y en a deux qui appréciaient tout particulièrement cette piste : Clark et Ickx. A eux deux, ils auront conquis toutes les poles et victoires de 1968 à 1973, se battant à coup de dixièmes alors que la concurrence pointait à plusieurs secondes, voire dizaines de secondes. Années après années, les chronos ne cessaient de s’améliorer suivant l’évolution des voitures, avec un gain de trois minutes au tour en vingt ans. Mieux encore, la pole de 1969 fut battue de vingt-trois secondes en 1971, elle-même écrasée de douze secondes l’année suivante. Ce n’est qu’en 1975 que la barre mythique des sept minutes est franchie, grâce à la pole position de Lauda, en six minutes et cinquante-huit secondes, le tour officiel le plus rapide pour une Formule 1. Mais même si ce circuit dangereux et imprévisible effrayait de nombreux pilotes, nombreux sont ceux qui goûtèrent à une première fois. Ce fut la première pole position pour Ascari en 1951, transformée en première victoire le lendemain, première pole également pour Gurney et Porsche en 1962, premier succès de Surtees en 1963. 1968 vit l’arrivée de Ickx au sommet, décrochant sa première pole avant de laisser le succès à son rival Stewart, puis en 1975, c’est Lafitte qui grimpe sur son premier podium, le premier de Williams, un an après ses débuts sur le même tracé du Nürburgring. La première apparition de Honda en grand-prix, la centième de Ferrari et de Lotus, autant de statistiques à ajouter pour cette piste des plus célèbres. Elle y couronna même trois pilotes, Ascari en 1952 et 1953, Fangio en 1957 et Clark en 1965. Mais le rendez-vous allemand fut aussi le théâtre de dernières fois, et pas des moindres. On peut y retrouver la dernière victoire de Fangio et de Maserati en 1957, l’ultime succès de Moss en 1961, le dernier podium de Von Trips cette même année, la dernière pole de P.Hill, toujours en 1961. Onze ans plus tard, c’est Ickx qui signe son dernier triomphe avant que, un an plus tard, ce ne soit l’autre Mr Nurburgring, Stewart, qui s’impose pour la vingt-septième et dernière fois de sa carrière. Mais fin 1976, une page se tourne. Le grand-prix d’Allemagne change de destination pour l'ultra rapide Hockenheim et ses interminables lignes droites en forêt. Mais le Nürburgring fut-il abandonné ? La réponse est bien entendu non.

Pour revenir dans le championnat, les organisateurs savent que la Nordschleife ne répond plus aux critères de sécurité de la Formule 1. Il est alors décidé de créer un tout nouveau tracé, bien plus petit, accolé à la célèbre boucle nord, de manière à pouvoir courir sur le petit ou le grand, ou bien les deux. C’est donc en 1984 que la nouvelle piste débarque dans le championnat du monde sous l’appellation “grand-prix d’Europe”. Avec ses 4,5 km, le nouveau tracé n’a rien à voir avec sa grande sœur. Les dégagements sont larges et sécurisés, les infrastructures neuves et modernes. Cependant, le dessin semble moyennement plaire aux pilotes. Si le vallonnement est toujours présent, les virages sont assez lents et les zones de dépassements finalement peu nombreuses. Si la place du grand-prix d’Allemagne est libre en 1985, il faudra ensuite attendre 1995 pour que le Nürburgring réintègre le calendrier et ce, jusqu’en 2007. A partir de cette année-là, l’Allemagne décide d’intervertir ses deux tracés historiques mais en 2013, l’alternance s’interrompt et plus jamais le Nürburgring ne fit d’apparition. Mais avant de disparaître, il eut le temps de nous offrir quelques courses rocambolesques. En 1995, c’est un M.Schumacher déchaîné qui remonte sur la Ferrari d’Alesi dans les derniers tours, rattrapant un retard en treize secondes en moins de huit tours. Quatre ans plus tard, c’est une course rocambolesque, voyant le spectaculaire crash de Diniz, l’abandon successif de nombreux leaders, des averses intermittentes, les larmes de Badoer et un podium inédit : Stewart, Prost, Stewart, ou plutôt Herbert, Trulli et Barrichello. En 2002, un gros changement est à noter. La section du premier virage est allongée de 600 mètres, ralentissant encore plus le peloton au départ. Un premier virage qui fut le théâtre des sorties de piste simultanées de sept voitures en 2007, provoquées par une pluie torrentielle s’abattant lors du premier tour. Un orage impressionnant qui vit émerger le seul à faire le pari des pneus pluie, Winkelhock et sa Spyker. Ce dernier effectuait son premier et unique départ en Formule 1, passant de la vingt-deuxième et dernière place à la première en moins de deux tours ! Cette épreuve nous offrit également une passe d’arme musclée entre Massa et Alonso, le brésilien n’hésitant pas à montrer son mécontentement sur le podium final. Si le circuit allemand nous offrit de belles manœuvres et des courses épiques, les exploits ne furent pas rares. Que ce soit Fabi en 1985, Hakkinen en 1997, Raikkonen en 2003, Heidfeld en 2005 ou Webber en 2009, chacun d’entre eux décrocha sa première, parfois unique, pole en Formule 1. Du côté des premiers succès, c’est Villeneuve en 1996 et Webber en 2009 qui s’illustrèrent, tout comme Trulli en 1999 et Massa en 2006 qui signèrent leur premier podium. Outre la pirouette de Diniz en 1999, quelques incidents émaillèrent ces différentes épreuves. La sortie de Hill en 1995 ou l'accrochage des Jordan avec M.Schumacher en 1997 eurent sûrement un impact sur le classement final du championnat. En 2005, c’est Raikkonen qui fut le malchanceux du jour, sa suspension lâchant dans le tout dernier tour alors que la victoire lui tendait les bras. Enfin, en 2013, pour la dernière épreuve disputée jusqu’ici au Nürburgring, la Marussia de Bianchi vit son moteur partir en fumée. Une fois le pilote sorti de sa monoplace, celle-ci dévala le circuit en marche arrière en roue libre, traversant dangereusement la piste sans personne à son bord, fort heureusement sans créer d’autre incident.

Cela fait donc de nombreuses années, si l’on excepte 2020, que le tracé allemand ne compte plus dans le championnat du monde de Formule 1. Pire encore, c’est l’Allemagne elle-même qui voit sa participation remise en question depuis plusieurs saisons déjà. Pour ce qui est de la célèbre boucle nord, celle-ci est loin d’être abandonnée, étant courtisée par de nombreuses personnes en quête de sensations fortes à bord de leur véhicule ou de courses d’endurance empruntant le Nordschleife avec le petit Nurburgring combiné. S’il est impossible de revoir une course de Formule 1 sur la piste vertigineuse de 22,8km, à ce jour, la dernière apparition d’une Formule 1 date de 2007 avec Heidfeld à son bord pour une démonstration de deux tours. Mais il est une particularité que le circuit allemand gardera très probablement à jamais : ses différents noms. En effet, c’est le seul tracé qui aura accueilli la Formule 1 sous trois dénominations différentes : grand-prix d’Allemagne, grand-prix d’Europe, et grand-prix… du Luxembourg !

Le circuit du Nürburgring en chiffres...

Années de présence en Formule 1 :

1951-1958, 1961-1969, 1971-1976, 1984-1985, 1995-2007, 2009, 2011, 2013, 2020

Longueur :

22.810 km (Nordschleife) / 5.148 km

Nombre de tours :

60

Meilleur temps en qualifications :

1'25"269 (Bottas - 2020)

Meilleur temps en course :

1'28"139 (Hamilton - 2020)

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