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Circuit de Jacarepaguá - Brésil

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Le Brésil et la F1, une grande histoire d’amour qui passe aussi par un tracé moins connu des fans de la dernière heure : Jacarepaguá.

Situé à quelques kilomètres de la mégalopole sud-américaine Rio de Janeiro, ce circuit au nom complexe aura fait les beaux jours de tout un pays durant les années 80. Le tracé, qui tourne dans le sens-invers des aiguilles d’une montre, ne représente pas vraiment de difficultés, que ce soit par sa platitude extrême ou par ses deux longues lignes droites entrecoupant des séries de courbes plus ou moins serrées. A l’instar de la piste d’Austin, celle de Jacarepaguá est également construite sur des marais, d’où la présence de bosses à de très nombreux endroits, véritable difficulté pour les pilotes. Pour ne rien arranger, le climat brésilien est aussi de la partie, c’est-à-dire une chaleur extrême combinée à une humidité tout aussi importante, voire de grosses averses. Nombreux sont les pilotes et les mécaniques ayant surchauffé au bout des minimum soixantes tours à courir.Sa première apparition remonte à 1978, après cinq ans de venue à Interlagos. L’atmosphère y est tout aussi bouillonnante grâce aux fidèles supporters brésiliens venus en nombre acclamer le héros local Fittipaldi et sa modeste Copersucar. Et pour cette grande première, le brésilien ne fait pas dans la dentelle en s’adjugeant le septième temps des qualifications, un beau résultat pour une si petite structure. Le dimanche sera encore meilleur et malgré la chaleur plus qu’écrasante, sa Copersucar se comporte à merveille, notamment grâce à des pneumatiques Good Year excellents ce jour-là. Pour autant, c’est une Ferrari chaussée de Michelin qui s’impose, celle de Reutemann, le premier succès en Formule 1 pour le manufacturier clermontois avec son pneumatique à carcasse radiale. Mais derrière, la surprise est encore plus impressionnante : Fittipaldi prend la seconde place synonyme de premier podium pour sa petite écurie ! Le public, en liesse, envahit la piste aussitôt la voiture jaune passée. Le vainqueur du jour, Reutemann, n’est que peu acclamé par rapport au héros et champion local. Mais au bout d’un an, le choix est fait de revenir à Interlagos mais après seulement deux éditions, le manque consternant de sécurité scelle le destin du circuit de Sao Paulo. Jacarepaguá revient alors sur le devant de la scène pour s’installer durablement dans le petit cirque de la Formule 1. En 1981, cependant, la chaleur laisse place à la pluie, ce qui ne décourage pas le poleman Piquet de s’élancer en slicks, un choix hasardeux vite compromis tant la piste est détrempée. Cette mauvaise décision profita aux Williams, elles chaussées de bonnes gommes et pourtant, la course des anglaises fut loin d‘être calme. Après avoir vu Prost et Pironi s’auto-éliminer, Reutemann et Jones volent alors vers un doublé facile mais la stratégie de course décidée avant le départ n’est pas respectée, ce qui ne plaît évidemment pas à Frank Williams. L’ordre établi, qui devait s’inverser, reste finalement identique, au grand désarroi du champion 1980, furieux, qui n’hésita pas à boycotter la cérémonie du podium. Le grand-prix suivant sera tout aussi bousculé par la politique, cette fois-ci mêlant la FOCA et la FISA. La cause principale de cette querelle tourne alors autour des turbos, de l’effet de sol et des coûts exorbitants de la discipline mais pour autant, ce sont les petites structures anglaises telles que Brabham et Williams qui prennent les devants. Mais ce regain de performance n’est pas dû au hasard mais plutôt par une astuce technique débusquée par les constructeurs. Il s’agit d’un gros réservoir d’eau, normalement dévolu au freins, rempli avant la pesée pour que la voiture affiche le poids minimal. L’idée est saugrenue mais lorsque ce réservoir, chez Williams en l'occurrence, crève sous les yeux des commissaires, il n’en faut pas plus pour suspendre tous les résultats. Ainsi, après deux grands-prix, Piquet et Rosberg sont disqualifiés alors qu’ils avaient obtenu les premières et deuxièmes places. La victoire revient donc à Prost sur tapis vert, au grand mécontentement des teams de la FOCA, menant inévitablement à un nouveau clash à Imola. En 1983, le circuit brésilien prend la place d’ouverture de championnat. C'est donc ici que le paddock émerveillé découvre la splendide Brabham BT52 et sa forme de flèche. Piquet sera d’ailleurs intraitable, suivi par Rosberg mais comme l’année passée, le finlandais sera exclu. Cette sanction s’explique par le fait que les mécaniciens Williams aient repoussé la machine blanche pour partir de stands après son arrêt ravitaillement, un pit-stop pas si bien réalisé comme en témoigne l’impressionnant incendie touchant le champion du monde 1982. Exceptionnellement, la deuxième position vacante reste innocupée.Il finira par finalement l’occuper en 1984, année où les fameux ravitaillements en essence sont proscrits, d’où de nombreuses pannes provoquant la colère de nombreux pilotes. Prost récolte les lauriers pour la seconde fois sur ce tracé, offrant au moteur TAG-Porsche un premier succès bien mérité. Cette course fut également la première d’un certain Senna, future star en son pays.

Le Pauliste qui aurait pu briller en 1985 si son moteur n’avait pas cassé alors qu’il occupait la troisième place derrière Prost et Alboreto. L’italien qui aura eu de la chance de s’en sortir sans dégâts après avoir harponné un Mansell visiblement sans rétroviseurs au premier virage. En 1986, alors que Frank Williams sort tout juste de son terrible accident, Senna s’illustre en signant la pole position au volant de sa Lotus, devant Piquet, de quoi ravir les très nombreux fans brésiliens amassés autour du circuit. Les deux hommes ne s’apprécient pourtant pas et sont totalement différents sur tous points de vue mais quoi qu’il en soit, la foule est entièrement acquise à leur cause. Cette manche d’ouverture représente la première apparition de Benetton en championnat du monde de Formule 1, plus seulement en tant que sponsor mais en tant qu’équipe à parts entières, avec de belles ambitions à la clé. Dès le départ, Mansell tente à nouveau de virer en tête mais en arrivant dans le premier virage, il ne peut éviter le contact avec Senna. Résultat, le voici, pour la seconde année consécutive, dans les barrières pour le premier virage de la saison. Si Piquet dépasse rapidement son compatriote, les deux brésiliens ne lâchent quasiment pas les deux premiers rangs, de quoi faire dérailler la voix des commentateurs locaux. Laffite complète ce podium, son avant-dernier en carrière après une course très ennuyeuse et pour cause, la limite d’essence embarquée ayant largement baissé, les temps étaient de l’ordre de huit à dix secondes plus lents que ceux réalisés en qualifications. 1987 marqua une différence encore plus significative, cette fois-ci entre les moteurs turbos, pourtant bridés, et les blocs atmosphériques avec un gap de dix secondes entre les deux sur un seul tour rapide. Comme souvent, la piste surchauffée perturbe le bon fonctionnement des gommes et les arrêts aux stands se multiplient. Fin tacticien, Prost roule volontairement deux secondes moins vite que ses principaux rivaux de manière à ménager sa monture et exécuter un pit stop de moins. Pari gagnant pour le français qui ne pointe plus qu’à une petite victoire de Stewart, détenteur du record de succès. Le Professeur qui s’imposa une cinquième fois ici même en 1988, enregistrant le premier triomphe de l’incroyable McLaren MP4/4, là où Senna, pourtant poleman, casse son sélecteur de vitesses avant même l’extinction des feux. Le brésilien sera par la suite disqualifié pour être monté dans le mulet alors que la procédure de départ était enclenchée, chose interdite par le règlement. Cette même année 1988 voit un étonnant changement concernant la piste de Jacarepaguá puisque son nom se transforme en “Circuit International Nelson Piquet”, de quoi faire grincer des dents les supporters brésiliens, bien plus derrière “Magic” Senna que le Carioca. La saison suivante, Ferrari étrenne une grosse nouveauté qui révolutionnera le sport automobile : la boîte de vitesses semi-automatique avec palettes au volant. Pour Mansell et Berger, plus de levier de vitesses. Sur le papier, l’idée est géniale mais dans la réalité, le système n’est absolument pas fiable et n’a toujours pas couvert la distance d’un grand-prix. L’autrichein ne pourra d’ailleurs pas en profiter longtemps, s’accrochant dès le départ avec Senna. L’innovation italienne tient le coup et malgré un changement de volant en cours d’épreuve, le moustachu vole vers un sensationnel succès pour la Scuderia, un triomphe aussi inattendu que mérité, le premier d’un moteur atmosphérique depuis dix ans. Prost et Gugelmin, ce dernier suivant les espoirs du Brésil, vite douchés après l’accident du départ et l’abandon de Piquet. Mais derrière la bonne humeur de l’anglais se cache une toute autre affaire, bien plus sombre. Quand l’argent dicte le pouvoir…

A l’issue du grand-prix de 1989; Ecclestone annonce la fin du contrat liant la Formule 1 et Jacarepaguá. La piste est remplacée par le tout nouveau tracé d’Interlagos, bien plus intéressant au niveau du pilotage. Le circuit de Rio sera peu à peu délaissé avant de totalement disparaître en 2016, rasé pour y construire des hôtels pour les Jeux Olympiques. Si le tracé n’était pas le plus attractif pour les pilotes et les écuries, il aura offert de belles batailles, souvent marquées par des pannes à répétition et une atmosphère bouillante, finalement propre au Brésil.

Le circuit de Jacarepaguá en chiffres...

Années de présence en Formule 1 :

1979 ; 1981 - 1989

Longueur :

5,031 km

Nombre de tours :

61

Meilleur temps en qualifications :

1'25''302 (Senna - 1989)

Meilleur temps en course :

1'32''507 (Patrese - 1989)

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